... . as: ...sz 2d. 5. a. . ..nn 3... 3...“... . 5.. .. 3...: .... 9...... 1:... 3...: : 3.. I: ... 5.3 .... 3...... s .. 3... .... 9:... u? .53.... ._ . . :rz....r....“u:.... .. Z - ... ....ial . . . 1 1. ~ .22 .... 1...}? ... .Z. .... ... .5. ... . ... 1’. . l~ is ‘3. ps vi.’ 1 0.. 7’2. 37 .1. ...-$53... nl!§2: ... .- z .I. I. I" it a: . ...i .... Jon-$5". ‘- v .. Til . r ,r‘ ,' u‘ h-S. .. . 1:52:15. ....vs... S ax..,..l.:. 5!. L. . I 71.1.1351! 9 ; ... é x2. 0 I. I 1 .11. 3.3:!) 537., 5...... I. 3::1M‘t. : ... . 5.3... 173”“. ... 1432.9.” K. i I?! #1.? 32.23:: .....11‘31 5.3. i. . 5'7 .9 : \x.. k. llllll'lllllllllillllllllii iii . 33 3 1293 01044 49 " iii This is to certify that the thesis entitled ROLE ET FONCTION DU MONUMENT MEDIEVAL DANS LE ROMAN DU DIX-NEUVIEME SIECLE presented by Agnés Peysson-Zeiss has been accepted towards fulfillment of the requirements for Ph.D. French degree in Major professor Date October 24, 1994 0-7639 MS U is an Affirmative Action/Equal Opportunity Institution LIBRARY Mlchlgan State University PLACE N RETURN BOX to roman this chock“ hum your ncord. TO AVOID F INES Mum on or Mon dd. duo. DATE DUE DATE DUE DATE DUE MSU chn Affirmative ActioNEqud Opportmlty lmtltulon mm: ...-,1 IUDLE ET FONCTION DU MONUMENT MEDIEVAL DANS LE ROMAN DU DIX- NEUVIEME SIECLE by Agnes Peysson-Zeiss A DISSERTATION Submitted to Michigan State University in partial fulfillment of the requirements for the degree of DOCTOR OF PHILOSOPHY Department of Romance and Classical Languages 1994 ‘A"' In- n-‘vau [ In oivu- a. bus‘g. . . , F’“"‘Ahq n nu ‘~~ - A. .V".V‘--n. :- . C" .n‘ ~“‘.. v~~ . .‘-~¢\‘ a 0‘ v 1 ABSTRACT ROLE ET FONCTION DU MONUMENT MEDIEVAL DANS LE ROMAN DU DIX- NEUVIEME SIECLE by Agnes Peysson-Zeiss In approaching the role and function of the medieval monument in Nineteenth Century novels, I would like to argue that the gothic revival starting with the writings of volney and Chateaubriand was used to recover a lost stability that the beginning of the nineteenth century desperately needed. Victor Hugo was the first one to problematize the restoration of this old order in his seminal novel: Metre-Dame de Paris. Huysmans and his decadent aesthetics, uses the gothic cathedral as a point of departure for a spiritual journey, mapping the writing of his book with his spiritual quest. However, the return to this ideal period of the Middle Ages Proving to be impossible, the logical conclusion was to turn tO.Emile Zola, who, as a naturalist dealt with the coming of 399 of the modern buildings. His two works: Le ventre de Paris and Au Bonheur des Dames reflect the triomph of mOdernity, and masses over the gothic order. Nevertheless, one cannot help wondering about the actual longevity of the "deITl buildings, since today “les Halles” have been moved and rebuilt, while Saint-Eustache still stands stable and erect_ Copyright by AGNES PEYSSON-ZEI SS 1994 A Eric, Philippe et mes parents iv ..... ACKNOWLEDGMENTS I would like to thank professor Lawrence M. Porter for all the help and the guidance he provided me. 9‘0-“ A~OUA- ~ .1 .e‘ocvv— U'v. “NV-th-Iun "' ' Ii. VI h-..1~ ““‘nop—a -_ —— V‘“---~-— ‘ I "’F AA " V‘s...v - TABLE OF CONTENTS INTRODUCTION .............................................. 1 CHAPITRE I: la restauration ............................. 28 CHAPITRE II : La restauration problématisée dans thre- Dame de Paris de Victor Hugo ............................. 67 1. Les personnages clés du roman ....................... 82 2. Les monuments médiévaux ............................. 92 3. Le livre ............................................ 99 Conclusion ............................................. 105 CHAPITRE III: Huysmans: un regain d’espoir ............ 107 l. L’espace medieval ................................... 112 2. L'espace monumental ................................. 118 3. Le chemin de croix: La cathédrale et L’oblat ........ 124 CHAPITRE IV: Zola, l’échec définitif? .................. 140 l. Saint-Eustache: église du passe ou element de permanence? ............................................ 149 2. Les Halles: triomphe d’une certaine modernité? ..... 157 3. Le Bonheur des Dames, edifice résolument moderne?.. 166 4. Echec et disparition du passe? .................... 178 CHAPITRE V: conclusion générale ........................ 184 vi .\ v . . . -~ . . I .h . . -.\\ a ;. .1 .. N. ... ... ... ;_ ... all. T. E .7. 3 I. I .... ... .2 . _ s: .... .I .3 . e .l .: a, . r :. ... ... .2 f «I .2 .. . ~.. *1 .»~ .. a. ~. 4‘ y. .. ..§ . ..\ . . . .. D 2. .. . .l _> e : ... ... .. .... . .. r .... .. . C Q.» C ..e : v. a. L: ... v. ..~ ._ . a. ... ... ... .3 .. . . . at p .. 1.2 .2 he . . ... a e .3 ... .. ._ - A: .3 - v s .. . .t E .. q .C. u .2 2. .. s“ ... ~ . .. . ~u. . . a. a: A. ‘ . .2 4 u s . Re «C . ‘ ...: INTRODUCT ION Le dix-neuviéme siecle a souvent été défini comme le siécle du monument, que ce soit d'un point de vue littéraire ou historique. .Les lecteurs découvrent l'importance des monuments a travers les oeuvres de Hugo dans thre-Dame de Paris; Huysmans, avec ses différents romans, particulierement ceux de la conversion; Theodore de Banville, dans les Odes funambulesques, et Les Caryatides, pour n'en citer que quelques exemples; ils percoivent cette méme influence dans l'urbanisme avec les travaux du baron Haussman, ainsi que ceux de Viollet-le—Duc qui restaura Notre—Dame de Paris, Saint—Germain-des-Pres, ou le chateau de Pierrefonds; et Ci'autres restaurations telles que celles de l'Arc de Tfifiiomphe, de la colonne de la place Vendéme, et du Pantheon; aillsi que dans l'histoire avec Sainte—Beuve a travers les descriptions de Port-Royal -- les batiments ont toujours tedlu une place importante dans l'histoire et la littérature du pays. Chaque siecle présente des caractéristiques Spmécifiques concernant les monuments qui sont reflétés dans 13éalrt du pays, au sein duquel ils tiennent une grande place: par1:iculierement les cathédrales gothiques qui, depuis les “t L. 1: RD“... Vv‘“‘ ..- .-.. *- .. .2 C. L. . . .3 . . a. ... ..- ~_v- “-- .1 .\« v. a. _ e. .2 BCV‘ »s A I‘v- \r v‘. .s. lax» ..~C ...: la 2 douzieme et treizieme siecles, dominent la ville de par leur stature et leur composition. 11 s'agit donc en premier lieu de donner une definition de ce que l'on appelle les monuments, d'examiner l'évolution de leur statut a travers les ages, et ensuite de tenter de determiner la raison pour laquelle l'élément gothique, et le renouveau médiéval jouerent un grand réle dans la littérature du dix-neuvieme siecle, en étudiant plus précisément sa place et la fonction qu'il occupe dans le roman. Les monuments historiques, en tant que tels, ne sont en fait qu'une notion récente qui n'a acquis le sens d'édifice, a part entiere, qu'a partir du dix—neuvieme siecle. Cependant, de la prise de conscience a l'application, le chemin resta pavé d'obstacles et d'arréts de cette progression. ILL existe un certain nombre de definitions concernant 1e monument, et selon le Nouveau Larousse Uhiversel, un monument est considéré comme un ouvrage d'architecture ou de sculpture, pour transmettre a la postérité le souvenir d'un grand [personnage], d'une belle action (...) [Les] monuments publics [sont des] edifices appartenant a l'état ou a une commune et destinés a l'utilité et a l'embellissement des villes. [Les] monuments historiques [sont des] edifices des temps antérieurs qu'il importe de conserver, soit a cause des souvenirs qui s'y rattachent, soit a cause de leur valeur artistiquel Les; monuments sont donc des constructions humaines qui ont étfié édifiées a travers les siecles par différents architectes, selon les désirs de différentes personnes possédant un pouvoir donné, ou ayant eu une influence dans leS affaires du pays. L'édifice, a partir du moment oil il a ey .. l >. e . u. .1: . . Vs .“ ~g. ”C .r. H.” “M" ..3. .: .e .3 .. :2 ... . . ... . a: .3 » .. .c . . . .t .3 ._ T. .. . .2 .. . a .. .L «a 2 2. .3 v. .3 . ... ... ~1 .. u .. .2 3. v. .. 4. Av v. 2. .3 E .. 4r: .. .. ... .; .vl. ... y. .t :. ... T. ... e. y .: Le .. S .. . ..H . .. . . Ce 3. ,. . M . . u . u: .3 .3 «2 v. ~... A» «flu is h v e .. . e "v e y. . . ..v .“ ‘~‘ A I l e .. a . . e ‘ ‘ e c . ~. . ”u” mm a“ .. 2. .2‘ ..u h... ..H .... -ru 1: I .n . a C u . «a a e a C ..«u ...: a e. *1 Q a . . . . 3 été construit, devient alors une entité artificielle, dont la destinée est de perpétuer 1e souvenir, et d'afficher diverses évolutions aussi bien architecturales, que sociales et politiques. Chaque batiment prend ainsi une certaine valeur qui lui est donnée selon des criteres subjectifs, en fonction de sa date de construction, de son style ou encore de sa valeur esthétique; 1e monument sert également d'indicateur de civilisation, car il posséde la particularité de permettre la mémorisation de par la valeur artistique ou historique qui lui est accordée. C'est en perpétuant le souvenir que le monument devient intemporel, universel et acquiert un statut historique qui le situe hors de la portée des étres humains; étant fragile, il convient de le pmotéger contre divers "vandalismes", et lui faire acquérir un statut de monument historique pour le mettre hors de portée de la destruction. Car, en effet, en tant qU'édifice, il est soumis a un certain nombres d'actes de vandalisme, et son parcours est semé d'obstacles retardant sa cflassification, car, lfijfll que Certains monuments soient construits de facon intentionnelle, C'est a dire qu'ils sont destinés par leurs auteurs a CC>Inmémorer un instant précis de l'histoire du pays, de la vie d'Llne personne ou d'un événement particulier. D'autres ne deViendront historiques que bien plus tard, apres avoir été répertoriés‘de facon subjective par des spécialistes. Quant a .léa troisiéme catégorie de monument, elle appartient aux mc>I'1L1ments anciens qui témoignent du passage du temps et de ~.. A.-o‘ --.‘v‘v .... .. ~J . Q .. L. .. n. r. ... .... ..a >- Z ... :4 :~ a: .su u. 5. ..~ 4. ... A: .2 ._ v. . . u... .~. v. a: .‘ he 1. Va. A\~ ‘H‘ .. ... ..a .t T, .. .,. S ... .t .. v .. a c ‘5“ a. y. .3 #8 s r. . v. ... ~: ... ra- .. ... ... .. ... u ~‘ . .‘u .. .. Z ... T. . . .v a. 1,... 4. ». ... ..s 4 leur résistance aux éléments, comme a celle de l'assaut des étres humains. Si de nos jours, il est possible de déterminer le statut des monuments historiques sans nous poser trop de questions, il n'en a pas été de meme durant la période antérieure a la révolution; si la connaissance du patrimoine se développa de Scévole de Sainte—Marthe a travers son oeuvre des Gallorum doctrine illustrium qui nostra partumque memoria floruerunt elogia (1598—1602), en passant par André Duchesne qui rédigea les Antiquités de la France, jusqu'a l'arrivée sur le marché du monument de Bernard de Montfaucon, auteur des Mbnuments de la monarchie francaise (1729-1733), la prise de conscience de l'intérét qu'il y avait a pmotéger les monuments historiques ne s'accomplit que bien plus tard. C'est a la suite de la Révolution francaise, désireuse de faire disparaitre les vestiges d'un passé hai, peuplé d'un "intégrisme" religieux, et d'une monarchie trop forte, que l'on vit s'accomplir une oeuvre de destruction et de saccage de nombreux édifices. Des cet instant, certains Iflévolutionnaires s'opposerent aux actes de vandalisme, et prtirent part a des commissions concernant la preservation des monuments. C'est en 1790, dans une revue concernant les antiquités nationales, que l'expression "monument historique" fit son QPEMarition dans l'oeuvre d'Aubin-Louis Millin, qui rédigea un recrueil d'Antiguités nationales, et qui publia également un OUXKrwage sur Les monuments francais devant servir de points y... -».~.~- . \ ~n..,. ~y. ...... .. v »\ .... ,- . u . ~ . _ Q v A . a~.. . v . ,nu .- . o r A . .Z t t. .3: .. .;.c....:. .......‘_.;. H. .. .3 ...? ._ E. 7,... T .2 E y. .2 T. .. . . . . . , l . I . _1 a... ... ... i. :a ..a. ..., ». ... .. 4: ... E ... ...c w. ... -. ..‘t. 3......” .... we. .... we. ......“ 5. ..t .... .2 - . . . . . a . y k; .. 2 g .1. . . ., . I. . .u . J r." ... ... . .. ....... T 3.“... . .t a 3 e. \ Ax .... Q r” q-‘ VM‘A‘ N\N .2 . . - .2 .. ...“. ;~ ’s s \ C u“. 4. 5 de repere pour les études spécialisées a venir. Une série d'ouvrages traitant les monuments historiques permet de noter cet éveil du public, et des personnes compétentes se mettent a l'écoute des monuments pour qu'ils soient protégés. C'est ainsi que la notion de monuments historiques se renforca a travers les années, et c'est l'abbé Grégoire (1750—1831), membre de la Convention et évéque constitutionnel de Blois, qui s'opposa au vandalisme en publiant son célebre "rapport sur les destructions opérées par le vandalisme et sur le moyens de le réprimer" du quatorze Fructidor de l'an second de la République; dans lequel il s'éleve contre les dilapidations [car] elles ont pour cause l'ignorance; i1 faut l'éclairer. : la négligence;, il faut la stimuler: la malveillance et l'aristocratie; il faut les comprimer. Quoi! dans le laps d'un siecle, la nature avare laisse a peine échapper de son sein quelques grands hommes; il a fallu trente ans d'études préliminaires et d'un travail continu gxnnrjproduire LHI livre profond, un tableau, une statue d'un grand style; et la torche d'un stupide, ou la hache d'un babare, les détruit en un moment! Tels sont cependant les forfaits qui, répétés journellement, nous forcent a gémir sur la perte d'une foule de chef—d'oeuvres. En général, un monument précieux est connu pour tel. A Moulins, personne n'ignore qu'il existe un mausolée de grand prix; a Strasbourg, tout le monde connait le tombeau de Maurice de Saxe, par Pigall, et dans l'hypothese qu'a défaut de connaissances et gofits, on ne put apprécier ces objets, que risque-t-on de consulter? Rien de plus sage que cette maxime d'un philosophe: dans le dgute, abstiens-tgi. Il est d'ailleurs des monumens, qui, sans avoir le cachet du génie, sont précieux pour l'histoire de l'art. (...) Ces monumens contribuent a la splendeur d'une nation et ajoutent a sa prépondérance politique. C'est la ce que les étrangers viennent admirer. Les arénes de Nimes et le pont du Gard ont peut-étre plus rapporté a la France qu'ils n'avoient cofité aux Romains2 Ifléikfloé Gregoire s'éleve ainsi contre tout acte commis envers les; nnonuments alors que ce n'est pas nécessaire. 11 se bat w- . -..~ “‘0‘" hv‘- b .1 1 rfi‘ —. .~ .. ... .. .. .. - .. .. ... .... ... .... ... .....‘ «C.:;..C..‘s.v~ wk ha ~‘x, ‘ A .t A. .3 .1 .. .. .. .1 .. . .. 4‘ : ... .....:.;. ..~.: .... .,.,.. . x. .m ... .. .. v. T 2. ... .3 . . . ... n 3. .c h... a r. ~... ~. .r. A... ~~.. he. v: .....C...‘ 2». Q. _. ... .7 ... .3 ... .. .. ... ... :. ... ... .2 .. ... g . ‘ . n. ‘ ‘ “2;; .. .. .. v. .2 ”3 v. .. rL. ... ._ v. ... _.. v. ... v. .. n. .: .. ... .. .: .... H. . ... ... .. ... ... .3 - .» ... .3 .1 ... .2 .... ... ... . . A. I . . .n~ ... ._ .v 4. v. w? .. .. v. .. .. n. . s ‘ . ..- 6 pour instruire les personnes et leur inculquer le gout des belles choses qui font la fierté d'une nation, et qu'il ne faut certainement pas laisser détruire sans les défendre. L'histoire et l'histoire de l'art sont présents dans les cours et permettent aux habitants d'un pays de s'informer et de se documenter sur les événements passés. Dans ce virulent rapport, il fait l'apologie des monuments faisant partie du patrimoine de Chaque nation et que l'on se doit de protéger. De la Convention a la protection des oeuvres architecturales, le pas fut vite sauté avec l'intervention de Montalivet qui rédigea des prescriptions en 1810 en vue d'inventorier Chateaux et abbayes, et de rapporter les oeuvres d'art dans leur lieu d'origine. D'autre part, Quatremere de Quincy (1755-1849), célebre archéologue, rédige en 1815 ses "considerations morales sur la destination des ouvrages de l'art", a travers lesquelles il traite la question de l'imagination, qui par le biais des oeuvres d'art nous fait voir tout ce qui est dans les monumens, et tout ce qui pourrait y étre; elle fait entendre et ce qu'ils disent et ce qu'ils sont capables de dire. Ceci n'ote rien au mérite de l'artiste; car si l'imagination ajoute quelquefois a la beauté de l'ouvrage, il n'y a que les beaux ouvrages qui puissent ainsi faire travailler l'imagination (...) En vain notre bizarre amateur lui efit demandé de redire, dans un site étranger, toutes ces merveilles qui jadis avaient charmé ses sens et son esprit; la ruine muette et privée d'effets, n'efit plus répondu a ses désirs. Détenteur de sa froide réalité, il efit préféré son souvenir a sa presence. Il lui efit fallu, pour revoir ce temple, le replacer en idée sur la cime du mont qu'il en efit dépouillé. Qui sait encore si le fait de sa possession matérielle ne lui efit pas enlevé jusqu'a la faculté de ce transport imaginaire3 Z. . .2 .w. n \ onv " r"“ .3 L. 2. ‘Nu -u NA ... v . 7 C'est le "seul fait de leur conservation [qui] les rend pour nous des objets merveilleux" (Destinations sur les ouvrages de l'art, p.66), ainsi donc, il est d'autant plus nécessaire de les conserver dans leur site d'origine, de ne pas les déplacer ni les morceler. C'est ce lien extrémement fort qui se tisse entre les monuments vétustes et les étres humains, selon Quincy, qui crée l'idée d'appartenance et la notion d'identité. Il ne faut absolument pas redonner a ces restes mutilés une menteuse intégrité, effacer et faire disparaitre des ouvrages antiques l'empreinte de l'antiquité, et leur redonner un faux air de jeunesse, [car] c'est leur enlever en partie leur valeur et leur beauté, et cette espece d'inviolabilité qui les défendait des attaques de l'esprit de critique (Destinations sur les ouvrages de l'art, p.67) 11 s'éleve également contre les restaurations qui étaient accomplies a des fins de protection et qui dénaturaient completement les édifices a cause de la facon dont elles se passaient. C'est d'ailleurs Mérimée qui s'élevera contre le vandalisme des restaurations faites a l'aide de badigeon sur les murs, ainsi que de peinture a l'huile sur les bas— reliefs, ou encore causé par les ajouts des époques ayant succédés a la période de construction. La question de restauration/rénovation se pose et donnera lieu a de grands débats tout au long du dix-neuvieme siécle; période pendant laqueflle le plus célebre défenseur de l'architecture et des IMNNJments historiques restera Victor Hugo dont nous éVOquerons 1e travail de longue haleine contre les deStructions de la "bande noire", et ses prises de position -..—... - - .— - “ v-o. ... ‘|.‘“-. _ v-.. — . .-Av" -~-AY~ \ .A--'~--_I.‘ ‘A g vs» ’ AAF.V hac‘v-’ ~Av“ l-v--‘~ .- C. .“ «C 2“. A.» ...‘. “a >k§ ..‘._~.‘ ..‘ k‘ 1. sf“ .. C... .....a; C........... . Q. .~. 5 «A. m...v‘..\w‘n 1: Avxym~ x...» ... C .. S .3.....: C. ... S .... C. "I 8 contre tout acte de vandalisme ou de démembrement des monuments historiques. Cette prise de conscience de la valeur des monuments historiques en tant que patrimoine résulte d'un développement progressif qui fut sensiblement restreint des la révolution avec la destruction des lieux de culte, a cause de leur valeur symbolique, faisant des monuments le cheval de bataille des révolutionnaires contre certaines institutions établies. Comme nous l'avons vu, ces destructions firent naitre de vives controverses dans les milieux artistiques, cependant, ce n'est qu'avec le ministére Guizot de 1830 qu'un poste dfinspecteur général des monuments historiques fut créé, instaurant une structure politique et administrative de facon a gérer et préserver les monuments. Cette mission fut confiée en premier lieu a Ludovic Vitet, un jeune historien et critique d'art, puis a Prosper Mérimée, qui parcouru la France, de 1834 a 1860 pour établir des rapports sur l'état des cathédrales et abbayes dont la condition se révélait souvent désastreuse. Il fut en faveur de s'occuper des monuments de maniere a les préserver, car, quoiqu’il en soit, laisser faire, consolider, restaurer, consentir au temps ou refuser son oeuvre, représente autant de choix qui, dans les années ou s'élabore le concept de monument historique, s'ils dérivent tous du traumatisme lié a l'effondrement de l'ancienne France, signifient une profonde divergence d'attitude a l'égard du passé. Ce passé, on peut, qu'on le chérisse ou qu'on l'oublie, l'accepter dans sa décrépitude. On peut aussi décider de le faire revivre, soit pour des raisons politiques et religieuses et c’est l’espoir des utltramontains, soit pour des raisons de patrimoine scientifique, et c’est le pari des néo-gothiques, aux yeux desquels l'analyse des edifices du XIIIe siécle permettra seule, par-dela l'immense erreur de 9 l'italianisme, de créer les conditions de l'architecture moderne et nationale. D’un coté: la resurrection intégrale. De l'autre: 1e linceul de pourpre ou dorment les dieux morts. Aux extrémités de la chaine: Chateaubriand et Viollet-le-Duc4 Un seul inspecteur étant entiérement insuffisant a l'énorme tache qui lui était donnée, a l'instigation de Vitet et de Mérimé, la Commission des Monuments Historiques fut créée en 1837, et régit durant cinquante ans la protection du patrimoine architectural. En 1834, Arcisse de Caumont fonda a Caen la société francaise pour la conservation et la description des monuments de France, qui deviendra plus tard la société francaise d'archéologie et qui publie régulierement, depuis 1835, le Bulletin monumental. Des 1821, une ordonnance royale avait créé l'école de Chartres qui s'orienta vers l'histoire médiévale. Cependant, ca n'est qu'avec la loi de 1913 que fut enfin adopté un texte consacrant les principes ayant été élaborés depuis la révolution. Pourtant, 6H1 dépit (ks ces reglementations concernant les monuments, il faudra attendre 1964 et la création de l'Inventaire Général pour que le role de ce poste soit véritablement institutionnalisé. Il est certain que tres tot des musées furent créés pour protéger des objets classés patrimoine historique, cependant, ils ne prirent en compte que des parties d'un tout qui reste Vulnerable, et les sites se trouverent morcelés, fragmentés en Lnazmot divisés. Des 1795, Alexandre Renoir ouvrit le premiem‘nmsée des monuments francais qui fut suivi en 1840 de .l'ouverture de l'hotel de Cluny par Sommerard, et Viollet-le— r“- -..—- - all" . ..- Ara- _> .. v1.4----‘- ..- V-.- .— .w‘V’ .-..- -..-n- A" van . y at ‘5‘ 10 Duc instaura le musée du Trocadéro en 1882 qui fut déplacé a Chaillot en 1937 pour ne citer que quelques musées. Néanmoins, cette organisation légale de la protection des monuments ayant pris quelques années, durant cette période, beaucoup d'édifices eurent le temps d'étre pillés, détruits ou laissés a l'abandon. Ce sont ces monuments qui feront l'objet de l'étude que nous nous proposons de faire sur le role et la position du monument médiéval au dix—neuvieme siecle, non plus sur le simple plan architectural et historique, mais au niveau littéraire a travers les romans de Volney, Chateaubriand, Hugo, Huysmans et Zola. Pour la plupart, ces auteurs se concentreront sur le monument médiéval qui prendra un role prédominant dans leur oeuvre littéraire, et il semble important d'étudier la raison du renouveau médiéval a cette époque, alors que le siecle traversait une période de crise économique, politique et sociale. Si l'intérét pour le style gothique, qui a toujours survécu a travers les différentes périodes historiques, subit un attrait renouvelé tres marqué a la fin du dix—huitieme siecle en France; il fut également trés fort dans la plupart des pays européens comme l'Allemagne, et l'Angleterre. Cet intérét se manifeste tout particulierement dans la littérature a travers laquelle les auteurs y voient de l'architecture nationale que tous revendiquent comme partie intégrale de leur culture. Ils tentent de promouvoir la preservation de ces monuments a travers l'écriture, e/ancrant ainsi sur des pages de papier leurs idées, manifestant leurs ..- ‘ ; -. .. .... ...rw .2 .. .. . ... ‘. .. .. r. ». ...... .. .2 .2 ... .2 a. . ..........:v... ......:._._.:.:.. ... .. ... . .. :. ... n .2 .2........ _._..._.....;._...... $21.... if... ... ... .. .. . ... ... .2 .. ......v... C .-. r. 74...... ..v. n. 3.2.... 2...... .... .. I , ... ... : ... T. ........ 3 «o. .. ..2 ... ... .... .. ..2 .2 ... A ... .3 v. v. .... . ... . . .... .2 Lu . . V... .... 3 s: .. Q. I an A: .1 . i‘ .. s 2. ... A. ‘ a c :. ... ..A ... .2 . . . . ... 3. 3. .---"‘\ ... ..-.._.,_,..-- ~ "A. vgv-av‘v AVA— ll émotions visuelles par la plume. Ainsi, Goethe dans "Von deutscher Baukunst" voit dans cette architecture gothique une architecture nationale allemande, et la revendique comme une création de l’esprit national allemand, remplacant le terme ”das Gotische Baukunst” par ”deutsche Baukunst”, car pour lui wenn der deutsche Kunstgelehrte, auf Horensagen neidischer Nachbarn, seinen Vorzug verkennt, dein Werk mit dem unverstandnen Worte gothisch verkleinert (...) das ist deutsche Baukunst, unsre Baukunst, da der Italianer sich keiner eignen rahmen darf, vielweniger der FranzosS (C’est moi qui souligne: Si des érudits Allemands de l’art, qui écoutent les voisins envieux, ne reconnaissent pas vos accomplissements et discréditent vos travaux alors qu’ ils ne comprennent pas le mot gothique (...) C’est l'architecture allemande, notre architecture, comme les Italiens n’ont pas d’architecture qui leur soit propre, ils ne peuvent pas s’enorgueillir d’avoir leur propre style architectural, encore moins les Francais peuvent-ils le faire) C’est ainsi que Goethe, méme s’il changea d’avis plus tard, en dépit de ses oppositions aux revendications des Francais, se rallia au style gothique en tant que style “nothwendig und wahr (nécessaire et vrai)” (VOn Deutscher Art und Kunst, p.123). Cette renaissance de l’art gothique de la fin du dix-huitieme siécle et du début du dix-neuvieme siecle ne se] limita pas a ce seul pays, mais s’étendit a l’Angleterre avec les écrits de John Carter dans "the Ancient Architecture of England" (1795-1814) qui revendique lui aussi l'architecture Gothique comme architecture nationale anglaise et considere que The following exemples will sufficiently show that the Pointed arch styles of Architecture in this kingdom, took their rise from the common changes attendant on all scientific pursuits, and from the common incidental occurences in architectural designs, and not according ...r. V. u...‘ .. a. _ .. ....:_;.:v.:_.;...__.:,‘_:v.:.._.;__;.:_._.:a. .v .. , . . . . . . . . . .... «~‘ ...S...L::.. .......~:.....r._:....34“.......3...:.“‘._:£..»4w mu ‘3 § C» s. .2 L.. a. .2 L‘ «b - ‘5 .1 .2 .. .. i? .2 : ... . . . .. ... ~ ‘ A. .c. ‘ L S Cit: 3 C V‘ C K. 9‘?“ 12 to the hitherto received opinion, that the Pointed arch styles were brought into this country from regions inhabited either by the Goths, the Vandals or the Saracens! How strange is it to hear grave and learned men dispute to which of the above people the meed of praise is to be given, for being the inventors of these wondrous species of human excellence, when they either forget, or will not own (for the sake of the argument) that the term, ”Gothic Architecture," ususally applied to distinguish the pointed arch manner, has not been in general acceptance for more than a century past; and that before the time of Sir Christopher Wren, such an individious and oppobrious appellation was scarce ever heard of: a name conjured up to stigmatize our national architecture with an idea of barbarism, that the compilations from the works of Greece and Rome, then overwhelming the land, might shine in an assumed luster, and the more easily usurp an universal sway over our despoiled and ruined structures, once the glory of this land, and which still demand admiration from a few, who can feel for, and venerate their forms. Could these investigators but consult, in a professional way, our ancient edifices, they would soon be convinced of the long train of error into which they have been betrayed, and own that no Goth, Vandal, or Saracen, had any share in the composition of the Pointed arch styles of architecture, but that our countrymen first gave existence to this divine order, on which we presume, by our humble labours, to throw a few sparks of light to develop its darkened majesty, to long overshadowed by prejudice, and a blind partiality to foreign arts!6 Chateaubriand, lui, y 'voit lui aussi un symbole de l'architecture nationale. Madame de Stael, quant a elle évoque le role des monuments en Allemagne et c'est a travers ses descriptions des beaux-arts que nous pouvons comprendre la position des monuments dans ce pays: La nouvelle école soutient dans les beaux arts 1e méme systeme qu'en littérature, et proclame hautement le christianisme comme la source du génie des modernes; les écrivains de cette école caractérisent aussi d'une facon toute nouvelle ce qui dans l'architecture gothique s'accorde avec les sentiments religieux des chrétiens. I1 ne s'ensuit pas que les modernes puissent et doivent construire des églises gothiques; ni l'art ni la nature ne se répétent: ce qui importe seulement, dans le silence actuel du talent, c'est de détruire le mépris qu'on a voulu jeter sur toutes les conceptions du Moyen \ _u w r w a. .~ A ~ a. v ” ~ w. .~ ¢ ... .. f. i‘~ . c L. v. y 2‘ . ... . .v I v. a: A__ ..i . a ~. . . .~a .1 ... ‘ . .‘ ‘ .2 j. y. .. 13 Age, sans doute il ne nous convient pas de l’adopter, mais rien ne nuit d'avantage au développement du génie que de considérer comme barbare quoi que ce soit d'original. J'ai déja dit, en parlant de l'Allemagne, qu'il y avait peu d'édifices modernes remarquables; on ne voit dans le nord en général que des monuments gothiques, et la nature et la poésie secondent les dispositions de l'ame que ces monuments font naitre7 C'est ainsi qu'a travers ces divers témoignages littéraires européens, nous pouvons comprendre 1e renouveau médiéval et le role qu'il avait pris dans ces pays. L'art moderne n'est pas "remarquable" et le seul style digne de ce nom, selon Germaine de Stael, est le style gothique qui est inspirant. Cet intérét renouvelé et unanime pour cette meme architecture révele tuna unité (he pensée surprenante considérant les relations qu'avaient les pays entre eux. L'effet des vofites ogivales, leur légereté ainsi que l'unité de leur composition et la stabilité de l'armature parviennent a émouvoir plus d'une personne, et jouent un role unificateur tres prisé; ainsi un écrivain allemand, Gorres, a donné une description intéressante d'une ancienne église: On voit, dit-il, des figures de Chevaliers a genoux sur un tombeau, les mains jointes; au dessus sont placées quelques raretés merveilleuses de l'Asie, qui semblent la pour attester comme témoins muets, les voyages du mort dans la Terre Sainte. Les arcades obscures de l'église couvrent de leur ombre ceux qui se reposent; on se croirait au milieu d'une forét dont la mort a pétrifié les branches et les feuilles, de maniere qu'elles ne pensent plus ni se balancer, ni s'agiter, quand les siecles comme le vent des nuits s'engouffrent sous les vofites prolongées. L'orgue fait entendre ses sons de bronze, a demi-détruits par l'humide vapeur du temps, indiquent confusément les grandes actions qui redeviennent de la fable apres avoir été si longtemps d'une éclatante vérité (De l'Allemagne, p.80) Chateaubriand va, lui aussi, jusqu'a voir un parallele entre l'architecture ogivale et la forét primitive, ressemblant a --~» ." r“ -vvu-fi L'v‘-v--”‘ . . .—. .._. .__ .- . . u. . . . . . s a r l . .. 1“...” .l A. .3 ._ .A A. .. ... v. ..a. .c- ... .. . . .. 1 :. .. r .... .... :._: ....r. .t...‘: :;.: S .t 2.7:: .2 3 ...: : .... . n at A. .. A: .. Z. . . A . . . E a: v. .. ..H L» S a. 1.. . . ...: .. e. .. g. .1\ ...: x -. r: .—. . . Vs u . .u 2‘ :~%. ’2‘ . .3 a . ~_. v5 C.» Nu. \ ~ I u? l4 un retour aux sources, rappelant le mythe du paradis perdu ou tout n'était que beauté et pureté. C'est ainsi que dans ce siecle troublé par les revolutions et les instabilités politiques et sociales, certains auteurs se tourneront vers l'époque médiévale en tant que période de renaissance spirituelle, économique et politique en espérant revenir a cette période de l'age d‘or percue a travers les cathédrales gothiques. C'est du style gothique que Huysmans dira: c'est a Victor Hugo, a Montalembert, a Viollet—le-Duc, a Didron, que nous devons le réveil de louanges dont se pare maintenant l'art gothique, si méprisé par le XVIIe et le XVIIIe siecle, en France. A leur suite, les charistes s'en sont mélés et ont parfois exhumé des layettes d'archives, des actes de naissance portant le nom des "maitres de la pierre vivel" qui batirent les cathédrales. (...) Celui-ci: tous les architectes, tous les archéologues depuis Viollet-le—Duc jusqu'a Quicherat, n'ont vu dans la basilique ogivale qu'un corps de pierre dont ils ont expliqué contradictoirement les origines et décrit plus ou moins ingénieusement les organes. Ils ont surtout noté le travail apparent des ages, les changements apportés d'un siecle a un autre; ils ont été a la fois physiologistes et historiens, mais ils ont abouti a ce que l'on pourrait nommer le matérialisme des monuments. Ils n'ont vu que la coque et l'écorce; ils se sont obnubilés devant le corps et ils ont oublié l'ame. Et pourtant l'ame des cathédrales existe; l'étude de la symbolique le prouve8 Pour lui, il n'est plus question de se pencher sur le probléme de l'extérieur, il faut prendre un role plus actif et se plonger dans l'étude de la symbolique des cathédrales qui vivent. Le corps n'est pas vide, comme celui de Notre- Dame de Paris, nous précisera Huysmans, il est plein d'une "ame" qui gouverne sa destinée, et anime les personnes qui y pénétrent d'une foi tant recherchée par l'auteur. Le coté materiel lui importe peu, en ce qui le concerne, il n'y a que . . ._ . . . _ .. . . ‘. x. . . .5 ». 4‘ 1. ; . __ .. «C ... . . ... . .3 Va a. v‘ s _ , . L. 2. . L. .. .. v. ._ A: .. .2 Q» i‘ C.» l: a. Q» .. v. . . .. .. v. ... v. .. .2 S S K: : ... .3 .h. ... S g z“ “3. ... ... ... ._ ... 2. .. .... .; .... : .... :a “w .. 4 x... .— a- ... .._» ~ . u. .o . .. . ... ”n "h v. 2. .t - ... .3 . . _ r ... v . 2. vs .‘ 4m .. . . u . 2. .: v. . ._ A. 3. .3 ... .v ..u I t e .4‘ Q. ‘~ wk; . . .1 w .. r v. 2. a . .3 v1 .. 4‘ ... 1 q a: u L. 4. 2. ~ e u .. L ~ 1.: 15 les entrailles de la cathédrale qui comptent, car c'est de la que part la vie. Oui, bien évidemment, i1 faut protéger les murs, mais ce n'est pas ce a quoi nous devons nous arréter, il faut aller plus loin dans la protection des monuments, et en faire une protection spirituelle. Ce renouveau médiéval que vivra le dix—neuvieme siecle permet d'observer l'aspect cyclique des civilisations, et permet aux auteurs dix—neuviémistes d'effectuer un retour en arriere en littérature et en histoire; il faut rappeler que c'est justement annc douzieme ex: treizieme siecles. que s'effectua le meme retour en arriere, ce désir de renaissance qu'éprouvaient les gens de cette époque. Ira raison est toujours la meme, l'instabilité de la période a fait naitre des peurs, et angoisses existentielles dues a la succession mal assurée par les fils et descendants de Charlemagne, qui, depuis le traite de Verdun de 843 avaient laissé péricliter son oeuvre d'unification. C'est ainsi que le pays, affaibli par de constantes luttes de succession a eu besoin d'envisager une restructuration, d'ou 1e desir de se purifier et faire 1e chemin en marche arriere. De plus, les circonstances étant plus ou moins identiques a celles du dix— neuvieme siecle entré depuis peu dans la revolution industrielle, la révolution commerciale avait lieu a cette époque, et le retour aux sources ne s'accomplit que plus facilement. Ce renouveau médiéval qui avait pris place aux douziéme et treizieme siécles, refait alors surface au dix— neuvieme siecle lors de la revolution industrielle. 11 a ... - .— ~-—J.¢_ . Ap‘*‘ ~~~V‘ ’- “ vv~.¢-.. VAr- --- vu-b ‘Av- --.. I . O . AflAfA-‘ .‘1 .x: .. :cf_..T.::T..;E.‘ , . ... 2. C .c I .2 C . . - 3 vols «in. .o. :R . ~:.....Ccl: . ... :C. c _ ~ r. f. 3 : .3 .4 Tc 1... .c a... E a. Y Av s. 5.. \v - I .‘ l6 alors semblé nécessaire d'établir des limites dans ce monde en plein progres, et la peur de l'instabilité, les troubles économiques et sociaux qu'entrainent une telle révolution firent naitre une littérature médiéviste qui avait besoin de s'exprimer pour exorciser ses terrreurs et ses angoisses. C'est donc dans la premiere partie du dix—neuvieme siecle que le moyen-age devient un objet de curiosité et d'étude, les auteurs se replongent dans cette période "de l'ége d'or" (qui avait été condamnée a la Renaissance pour son ignorance et son obscurité). Il semble ensuite nécessaire de définir ce qu'on entend par architecture et sa representation en tant qu'oeuvre d'art incorporée dans une autre oeuvre d'art, qui est ce sur quoi nous allons nous pencher dans cette étude. Selon l'Encyclopédia Universalis jusqu'au siecle dernier, l'architecture se définissait par le rapport spatial des vides et des pleins; cette configuration était elle-meme subordonnée aux considerations de poids et de resistance. Ces deux notions demeuraient empiriques; le travail de maconnerie recherchait un équilibre naturel entre les contraintes extérieures et intérieures, dans les cas les plus difficiles, commes les coupoles et les vofites, l'expérience et l'intuition suppléaient l'absence du calcul scientifique sur la résistance des matériaux9 D'autre part, l'étymologie nous apprend que le mot est Compose de "tecture" qui présuppose l'action de batir, le "taktonicos" étant le charpentier; quant au terme "arche", une definition d'Aristote nous apprend que "Principe (arche) Se dit d'abord du point de départ pour chaque chose" (Métaphysique, l, 1012 b 39) et présente l'architecte comme le premier ouvrier, le premier rédacteur/ créateur de _‘ ...-- ... ‘vnf‘. - v _ V..-’ "' ' -r‘ A! 4v..----vv L. ~f r” u. .. ... p“ 4. u. .2 .. .. r“ v. .2 _. .1 v. A. .. I. n; a; ~. :» ...n~ at ... ~—_ 5. C. . s: v. a. L. A. v. ... ... . . . ~ A A-.. . v- ya. u uso. —‘ v ... 2. .3 F” ... ... .2 h. ~\~ .\. —.. 1‘ .: ... -u to .2 ‘ ‘ 2‘ s: L: 4: C. v . ..t u . ..~ ‘ a s ‘ l7 civilisations. Giedion dans son oeuvre Space, Time and Architecture développe le concept d’architecture universelle, génitrice de civilisations a travers les siecles: [the emanating force of architecture] is generated by the respect it has given to the eternal cosmic and terrestrial conditions of a particular region [which] have served as springboards for the artistic imagination. It has often been remarked that the painting of this century [19th] has again and again driven boreholes into the past, both to renew contact with spiritual forebears and to draw new strengths from these contacts. As in architecture, this is not achieved by adopting the forms of the past but by developing a spiritual bondlo Ce respect du passé, retenu par ce "spiritual bond" augure de la continuité des formes et des structures, par un lien continu sans essayer de se laver les mains du passe, mais en en tenant compte. Il n'existe pas une seule architecture, mais une pluralité de formes, toutes ayant un lien entre elles, donnant lieu a des modes de pensées, servant de déclic a la création. C'est pourquoi au dix-neuvieme siecle, aprés l'éradication des monuments par les révolutionnaires, les auteurs sentirent le besoin de se replonger dans le passé pour se ressourcer et faire le plein d'idées. L'architecture les y a aidés, étant une des formes d’expression de la beauté existant dans le monde, et une representation de sa Complexité. De plus c’est une science qui s’est développée jusqu’a devenir extrémement complexe et qui progresse parallelement a l'évolution de l’étre humain; ce dernier, lorsqu'il se sent nemacé se tourne vers le monument pour eSSaYer d'y trouver une réponse a ses questions. D'autre part, la majorité des auteurs dont nous allons parler se ...,- -ynav- .4- -..- ‘.u - hw-‘-.~nl ‘- .A\\ ”N. .. y . . .. . . . .. j. 7 ... ._ .. E r. .. .. .... h... M... .. ._ .. .3 E ... .c .. 0.... . ...... .....t..~. .. . ... .. a. Q. 3 ... S 3 i. . h .. . ... . .. . _.. T. ... .1 .t .2 .1 .. —. v. .. . .2 a» it r a. a. . ‘ i ..t a“ . .... .... v. .2 .. .... .. J... . ~. .... N... “w. .A.. .t .‘ r v. .. v. Q a. at A: . . . .. .. .3 .. .c .c c c J . . , ..p~ .: a. . .3 w. . — vs a» Vs C» aux I ... .‘\ «I. \u ..u 2. v. i: a: N» ‘ ‘ “La y y A: ~.. . . . . m A. o 2» . . _ .. .. . .. a .2. :3 . a .2 .1 24 A: V q a: :- a ~ . .s A N .A n . \ ~ \ 4 u l8 tournera vers le monument médiéval religieux, lieu de recueillement cfil ils espéraient trouver LUKE aide, ‘une solution a leurs questions et leurs peurs. Cette evolution de l'architecture a adopté plusieurs stades qui malgré cela restent reliés et s’entremélent sans étre completement dissociés les uns des autres: There are three stages of architectural development. During the first stage (...) space was brought into being by the interplay between volumes. This stage encompassed the architecture of Egypt, Sumer and Greece. (...) The second space conception began in the midst of the Roman period when interior space and with it the vaulting problem started to become the highest aim of architecture. The Roman Pantheon with its forerunners marks its beginnings. During the second space conception, the formation of interior space became synonymous with hollowed-out interior space (...) The nineteenth century forms an intermediary link. A spatial analysis of its buildings indicates that elements of all the different phases of the second stage are simultaneously intermingled(...) the third space conception set in at the beginning of this century with the optical revolution n L’architecture étant une oeuvre d’art, car elle manifeste une certaine volonté esthétique de l’auteur/artiste, nous aimerions étudier l'intégration de l'architecture dans une autre oeuvre d'art: la littérature. N'oublions pas les vers Celebres de Théophile Gautier dans "L'Art" (1857): "Sculpte, lhne, ciselle: /Que ton réve flottant/Se scelle/ Dans le dur bhoc resistant!" (p.130). Ces vers impriment dans la pierre des Inurs les pensées de l'auteur, qui devient l'architecte de la ltittérature en construisant ses propres monuments élevés a la PKDstérité, imprimés sur des pages blanches. Ils suivent de qtualques années le poeme intitulé ”Moyen Age” dans lequel T- GEUJtier décrit les ”vieux Chateaux gothiques" car il aime -‘—--‘ v A .— v ... v. .3 ... . a. . ... ... .s‘ («~— _‘ _.. _.. ~: —~» .3 .. ~... Lt :2 . ... SH .... ... ...... .... ...... t. 19 leurs toits d’ardoise, aux reflets bleus et gris Aux faites couronnés d’arbustes rabougris, Leurs pignons anguleux, leurs tourelles aigués, Dans les réseaux de plomb leurs vitres exigués, Légende des Vieux temps ou les preux et les saints Se groupent sous l’ogive en fantasques dessins; Avec ses minarets mauresques, la chapelle Dont la cloche qui tinte a la priere appelle; J’aime leurs murs verdis par l’eau du ciel lavés, Leurs cours ou l’herbe croit a travers les pavés, Au sommet des donjons leurs girouettes fréles Que la blanche cigogne effleure de ses ailes; Leurs ponts-levis tremblants, leurs portails blasonnés De monstres, de griffons, bizarrement ornés, Leurs larges escaliers aux marches colossales, Leurs corridors sans fin et leurs immenses salles, on comme une voix faible erre et gémit le vent, on, recueilli dans moi, je m’égare révant, Paré de souvenirs d’amour et de féerie, Le brillant moyen age de la chevalerie12 Cet étalage de souvenirs médiévaux dévoile l'attrait que représentait le moyen-age au dix—neuvieme siecle, de par sa magnificence, et la grandeur de ses lieux. Gautier n'est bien évidemment pas le seul poete de son époque a évoquer le moyen-age et nous aimerions nous concentrer plus particulierement sur le roman au dix-neuvieme siecle et le role qu'a pu jouer le monument médiéval dans la conception des ouvrages. Pour Sainte—Beuve, le monument comme le moyen-age jouent un role important dans l’histoire, c’est ainsi que selon lui: on est revenu de nos jours a ce merveilleux tant qu’on a pu, par l’imagination, par la résurrection des choses du Moyen-Age, par un enthousiasme d'artiste, d’archéologue, de romantique encore plus que de chrétien. Nous avons vu commencer ce mouvement, nous le ‘voyons finir et étre meme plus court qu'une vie d’homme. .Am.point de vue historique, c’a été peut-étre une (excursion heureuse, une brillante croisade du gofit: au Ipoint de vue pratique et moral, qu'en est-i1 resté?13 . . _ .. t .. .: ... . . .. .. .. ... y. . .. _ __ ... . ... 2 . . . . n.— .. .. . V v. .: v. .. .... ~ .‘ w. ... I .: ~.~ Q» 4‘ ~ . . . . .\ .e ‘ . . ‘ .~. «\~ . «xv » ‘fi H L r . >- s. c . u . . :u . ‘ n— . ‘a . \~ ~ . E ‘ .. ... .. . . ... .. .. ... ... .. T. . ... ... r .2 ... 3 .. a i. .... ... ... v. ... .2 .: ... 3 v. E a. ... .... ... ». ... ... ... .2 ,: ... r” .. u. .. .. .. .. C. p? v. .. w. .2 V. v. ... Q. -. ... u. a” .. v. .. .2 ... a. r. . . .. a. i. .. .3 a. to 3. w .. .... .. .u ... .3 .3 ... ... .3 .2 L: .. . . . . ... ..~. ~. ~ .. .. . a. 2. ~ «- ... - .~. A e r . v . . ... A v - ._. . . . ‘ a y .. « A v .— u . \ ..~. A.u .. \ I . . . . .... 2. .. . . . . . n... .2 . . 2 u .2 ‘ ~ . . .3 q: a . .1 . . < . . ~ ‘ s ..A‘ 20 Au vingtieme siecle, le sujet de l'influence du moyen- age anl dix-neuvieme siecle 51 été longuement débattu; cependant, aucun des auteurs n’a traité la question de l'évolution du monument médiéval a travers les différents genres littéraires du dix-neuviéme siecle. Pierre Citron, il est vrai, a effectué une étude sur la poésie de Paris dans son oeuvre séminale La poésie de Paris dans la littérature francaise de Rousseau a Baudelaire, de meme Jean Maillon traite l'aspect architectural de la ville dans Victor Hugo et l'art architectural, et bien sfir Patricia Ward dans The Medievalism of Victor HUgo développe l'influence du moyen—age sous différents aspects. Depuis les années soixante-dix, l'approche de l'art gothique n'a été qu'une suite continuelle des remises en cause des theories abordées au dix-neuvieme siécle. La théorie fontionnaliste élaborée par Viollet-le- Duc avait eu une emprise telle que toutes les études tournaient autour de ses théories, sans vraiment chercher ailleurs ce qu'il en était. Ce n'est qu'aujourd'hui qu'elles sont remises en question et qu'elles donnent lieu a d'autres théories, démystifiant ainsi le role joué par Viollet—le—Duc. Dans l'étude que nous nous proposons de faire nous ainuerions développer l'idée du monument médiéval en tant que ténxain de l'histoire de l'humanité, en étudiant 1e role qu'il jOUEl au dix-neuvieme siecle dans les différents mouvements littéraires que sont le romantisme, le naturalisme et l’eSthétisme décadent, et en étudiant l'évolution de la ~ ~ vvoAV-»v-.« AA’AAv-p. ... I .H .... . . . . . L. .3 A -.S . . .. . . . . g a .3. ”_.. .L. .1 v. .. ... ... A. .3 v. .. L. . ”— ... MW .... .. .. L. .2. ~.. v. .. . .. C. . . . . v\ .C n\ .. . ~ . . ‘ . .. ... 5 f L .... .... ... Z .... C ... ... .... C. ... .. ... ... .nm .uv n¢ ... Y . .w . a~a «\v by ‘ b 5- o \. §. AV A~¥ . «\s «a! . L . . . w.” ...: 4: .... ... 4..“ 2. ... Q. .. .. .. ..~ C. u... .. ... w . . . ». ...: . . . ... .u . . .M. ...” ... ..... .. ... ... ..~.: .. .... .3 «... s. .2. u . a . . 2. a . .D u... M . 2‘ .p .. Q. W“. V‘. Y. y\ . . . a . . , 2 Q. .. . . I. ... 2. ... .... ‘~s \. s 21 conception du monument et de ce retour aux sources anciennes dans les auteurs suivants. Dans un premier chapitre, il s'agit de mettre en oeuvre les actants de cette these, et de jeter les bases du renouveau médiéval au dix-neuvieme siecle, ce que nous allons faire a travers une premiere étude concernant une premiere période de restauration. Dans cette premiere partie, il est nécessaire de cerner le probleme et d'adresser la question de l'importance des monuments dans la littérature de la fin du dix—huitieme, début du diX-neuvieme siecle. C'est a travers les oeuvres de Volney tout d’abord, puis de Chateaubriand que nous évoquerons et traiterons en premier lieu l’état physique des monuments avant de nous occuper de leur statut littéraire. Chacun des deux auteurs que nous allons étudier se tournera vers le monument historique comme borne marquant toute une civilisation, et qui, se trouvant en danger, signale le mal étre que traverse pays. C’est ainsi que le monument agit comme reflet de la civilisation de l'époque, et C'est en tant qu'indicateur qu’il a comme mission d'alerter La population. C’est a travers le travail de Volney et de Chateaubriand sur les ruines des civilisations que les lecn:eurs s’éveilleront au danger encouru. Ces deux ouvrages Sur‘ les ruines meneront a un lent travail de reconstruction Par Lles auteurs suivants. Car, cette restauration historique Se txransformera en restauration littéraire et reconstruira peu é. peu 1e patrimoine historique de la France. En effet. le révolution ayant laissé le pays saigné a blanc, il devient ~: ...“ -,.oa~' ...... V" n. A‘ ... a- --..~—\_ bit h—‘- . - Vvvug “~a‘. ..‘w .5“ - - ~ .. .3 . . « ah. . ‘ ~ ‘ n . A.» .2 2‘ 22 nécessaire de tout refaire, et pour avoir des points de repére une des solutions se trouve étre le retour vers le moyen-ége du XIIe et XIIIe siecle, période de renaissance. Le modele une fois établi, i1 ne reste plus aux auteurs suivants qu’a s’inspirer de cette tradition et essayer de faire redémarrer le pays en prenant appui sur d’anciennes bases. Dans un deuxieme chapitre, nous traiterons la restauration problématisée par Victor Hugo dans son oeuvre séminale Akwre-Dame de Paris cfil il est question de la cathédrale en tant que personnage a part entiere, établit pour dominer la capitale. Il s’agira au premier abord de s'occuper du batiment en tant que tel et d’étudier les différentes restaurations effectuées par Viollet-le-Duc, puis de développer 1e theme de la cathédrale. L’unité nécessaire a la survie du pays ne régnant plus au dix—neuvieme siecle, seul le monument est capable de maintenir cette structure et éviter la fragmentation. Notre-Dame de Paris est un livre exprimant une certaine mise en abyme reflétant la structure de la société, ainsi que la profondeur du probleme ambiant. Tout dans cet ouvrage s’emboite parfaitement, car les Pexnsonnages sont des personnages aux idéaux médiévaux, qui font partie d’un tout plus vaste: le monument gothique médixéval représente par Notre-Dame de Paris, dans laquelle ils ssont protégés pendant quelques temps, et ou ils gofitent cettée pureté médiévale tant recherchée. Cette structure est €31 féiit le support d’un infiniment plus grand: le livre- ...-...- 4 A-‘V ... 51"." PAD’ ,n . . .. ... ... . . ... . . .. .. .. .»u w: .3 ~. Lu ~. .2 .. r“ L. .3 :3 ~. aw - _ .: u: A: *u. :3 u. .: A; v. I . . . .. ... .. ... . Q. .. .. . . Z. Z .: Z . C 2 ._ E at S ... 3. .3 U. .u .3 : ... .2 . . T. : r .... v. .2 . .p” .. .... .. ... ... v“ .. a. «o ... to 2. - ... ; .. r" ... . . ... .3 .. ... ... . ,. . . ... c. v. . . .3 . . ... ... r u- .: . . T. v. ... 7., .3 7. . . 23 cathédrale, qui renforce l'impact donné par la beauté et la force de la cathédrale. Le livre prend en quelque sorte 1e relais de la cathédrale en tant que dictionnaire de l’humanité. Le scripteur, qui avait tant prone la domination de l'écrit sur la pierre a la suite de l’invention de l'imprimerie part Gutenberg, triomphe et remplace la pierre et son héritage par le papier et sa multiplicité, remplacant en cela la pérennité de la pierre. Le retour aux sources du moyen-age est-i1 toujours possible? La question se pose tres vite, mais semble ne trouver qu’une réponse négative, car le seul moment de paix ne peut s’effectuer que sous la vofite de la cathédrale, et une fois a l’extérieur, le monde du quinzieme siecle triomphe de nouveau. Apres les ruines, le renouveau médiéval resitué a l’époque de cette transition, entre le moyen-age et la renaissance, semble n’étre qu’un mythe et laisser les lecteurs sans solution précise. C’est alors que nous étudierons l'effet de ce retour aux sources du moyen—age chez un auteur célebre pour son evolution a travers les genres: Joris-Karl Huysmans. Dans ce troisieme chapitre intitulé ”une regain d’espoir”, nous allons traiter la question de la quéte de llamateur a travers les différents genres littéraires auxquels il aura recours avant de trouver la solution qui lui Conxfiiendra 1e mieux. C’est a travers son oeuvre littéraire d"A» rebours a L’oblat que nous pourrons voir évoluer cet autetur et étudier 1e role du monument médiéval dans ses ouvréuges. Son parcours sera encombré d’échecs qui ne seront 0" -v . :. .... v 2. ~.. 1. ... . v” r». .: ... .. .. v. ... . . ... .. .. 2. .u ... .. Z - _. ... .1 . . .. . . i... .. .. . . . . .. ..t .c .2 ... .... ... 2. .2 .. x .— .2 . .. 2‘ ~.. .t .... . . 24 qu’une suite de remises en question sur le pourquoi de la vie. L'intérét de l’étude de Huysmans est que c'est a travers les oeuvres d’art que ses sens entrent en action, et c’est a travers les cathédrales et les monuments médiévaux que le scripteur tentera de trouver une réponse a ses questions. Il devra pour cela se replacer dans un contexte médiéval et évoluer dans des espaces temporels différents. En effet, il repartira dans les La—bas, au quinzieme siecle, avec le personnage de Gilles de Rais et les atrocités que l'on connait, avant de prendre une autre direction et se tourner vers 1H1 espace temporel d’une nature différente: l'espace spirituel. En effet, c’est a travers ses ouvrages de la conversion que le scripteur trouvera une réponse a ses questions a l’intérieur des cathédrales qu’il visitera. La cathédrale n’est plus un simple monument, elle devient le symbole de la conversion, l'instrument de salut vu a travers la perspective chrétienne du scripteur. La cathédrale se remétamorphose en livre ouvert dans lequel le scripteur déchiffre 1e message divin ou présent, passé et avenir se fondent, pour devenir intemporels. Le retour vers le moyen— age devenant une possibilité de plus en plus éloignée, il devient important de se tourner vers l’oeuvre d’Emile Zola dans laquelle nous étudierons le mouvement de retrait des monuments médiévaux. Dans le dernier chapitre nous évoquerons Le ventre de Paris et Au bonheur des Dames , deux des oeuvres d’Emile Zola qui Symbolisent l'échec du médiévisme et la montée du monde A. w w""-r’ ... gut"-..v D _v._v‘ ‘ p- d-~“'"--v . w R‘ ov“".-A-. ..— ‘--..--" a .: ..A‘ :- .—v .—v . . .aw . . N. ... .. "I .A—- ... ... ... a. I v-.. . ‘5 ... “A a ‘V‘ 2. ... . ... ... . a: .. .. ... ... ... .1 .. ~\~ u. ~.. .2 L: ... ... .2 ..l c\‘ ..n .5! .... .2 4: .54 ah ha a: .2 «C Q.» .3. u k; 25 moderne a Paris. Nous aborderons donc la question de la disparition de l’ancien et de l’apparition des structures architecturales modernes.‘ Apres l’age ck; pierre, nous assistons a la prépondérance de l’age de fer qui domine la ville a travers tous les monuments cités. Cependant, cette étude se révelera pleine de points d’interrogation, car des 1e départ, nous nous trouvons face a un dilemme, celui de savoir si la modernité est vraiment l’élément triomphateur. C'est ainsi qu'en étudiant les cathédrales des temps modernes: les Halles de Paris et les grands magasins, nous pourrons voir l'évolution de cette modernité. C’est également en étudiant l’histoire de Paris a l’heure de la révolution industrielle et son évolution jusqu’a nos jours, que nous pourrons vraiment atteindre le coeur du probleme et décider si les monuments anciens, particulierement l’église Saint-Eustache dans ce chapitre, ont perdu la partie. C’est tout au long de ces différents chapitres traitant l’évolution du monument a travers les mouvements littéraires du dix— neuvieme siecle que nous pourrons vérifier si le renouveau médiéval était vraiment une pmssibilité envisageable et quelles en étaient les modalités. La conclusion essayera de faire la synthese de cette étude et d'examiner le sort des monuments au vingtieme siecle, le retour aux sources du moyen—age s’avere-t-il vraiment étre un échec, le batiment moderne va-t—il vraiment prendre le pas sur l'ancien, le passe est-i1 véritablement révolu? Ce sont autant de .1. . 26 questions auxquelles nous tacherons d’apporter des solutions dans une conclusion a cette étude. 27 NOTES 1N'ouveau Larousse Universel, Tome II [Paris: Librairie Larousse, 1949] 245. 2Abbé Grégoire, "rapport sur les destructions opérées par le vandalisme et sur les moyens de le réprimer." Oeuvres de l'abbé Grégoire: Grégoire député a la convention nationale. Tome II [Paris: Editions d'Histoire Sociale, 1977] 276-7. 3Quatremére de Quincy, Considerations morales sur la destinations des ouvrages de l'art, [Paris: Librairie Arthéme Fayard, 1989] 69-70. 4Nora, Pierre, La nation in Les lieux de mémoire, Tome II [Paris: Editions Galimard, 1986] 598—99. SEdna Purdie Ed., Vbn Deutscher art und Kunst, [Oxford: Clarendon Press, 1924] 128. 6John Carter, The Ancient Architecture of England, [London: Henry G. Bohn Ed., 1845] 32. 7Madame de Staél, De l'Allemagne, Tome II [Paris: Garnier—Flammarion, 1968] 79-80. 8Joris-Karl Huysmans, Trois églises et trois primitifs, [Paris: Librairie Plon, 1908] 3-4. 9Encyclopedia Universalis, Corpus 2 [Paris: Encyclopedia Universalis France SA, 1989] 842. loGidieon, Space, Time and Architecture, [Cambridgez the Harvard University Press, 1949] xxxvii. 1'lGidieon, lv—lvi. 12Théophile Gautier, Poésies completes, Tome I [Paris: Nizet, 1970] 4. 1'3Sainte—Beuve,Port-Royal, Tome III, liv. VI [Paris: Librairie Gallinard, 1955] 219~220. -- .uvn -..u—r~ p ar‘ .u. ... II|II Chapitre I La. restauration Alors que le dix-neuvieme siecle sortait tout juste du chaos révolutionnaire avec le Consulat, Napoléon prit le pouvoir; c'est ainsi que ce siecle qui venait a peine de naitre allait se replonger dans une période tumultueuse qui, de 1800 a 1900 verra se succéder sept régimes politiques: 1e Consulat (1799-1804), l'Empire (1804-1814,1815), la Restauration (1814—1815, 1815—1830), la Monarchie de Juillet (1830-1848), 111 Seconde République (1848-1851) 112 Second Empire (1852-1870), et la Troisieme République (1870-1940). Apres une innombrable série de gouvernements, aussi instables les uns que les autres, et une multitude de gouvernants, 1e dix-neuvieme siecle prendra fin sans avoir véritablement résolu les problemes politiques, économiques et sociaux qui l'étouffaient. C’est de la révolution de 1848 que Lukacs dira: . [it] means a decisive alteration in class groupings and in class attittudes to all important questions of social life, to the perspective of social development1 Cependant ces actions, ces changements de moeurs et d'attitudes ne résolvérent pas le probleme de l’époque et la stabilité politique ne fera surface que bien plus tard avec la Constitution de la Cinquieme République. C'est a l’historien du dix-neuvieme siecle; Michelet, qu'il revient d'analyser dans sa préface de 1847 la situation a postériori 28 .: ..... .. .: r .. .. ..t. .3. 3.. t. . ..3. ... ... .... ... ... ... ... .. ... ... .. n z . .2 ...W .L . . 2. .. ... ... . .. ... v s. .. . .o V“ Z. ... . 2 2. ...: .c . . r. . . r” n. ... .p~ r ... .. ... v. «2 ._ ..v C. 2. .3. ..u ..w w.” w“ I“ . . . . L: .... .3 . . o ..l .... .. . . A \ 29 et les consequences de la révolution sur le reste du pays. Son analyse n'en sera que plus déprimante, car pour lui la révolution n'a laissé en heritage qu'un vaste champ de ruines, et il la décrit comme un événement sans véritable substance, n'ayant eu qu'un résultat négatif: Le Champs de Mars, voila 1e seul monument qu’a laissé la Revolution ... L’empire a sa colonne, et il a pris encore presque a lui seul l’Arc de Triomphe; la royauté a son Louvre, ses Invalides; la féodale église de 1200 trone encore a Notre-Dame; i1 n’est pas jusqu’aux Romains, qui n’aient que les Thermes de César. Et la Revolution a pour monument... le vide Son monument, c’est ce sable, aussi plan que l'Arabie un tumulus a droite et un tumulus a gauche, comme ceux que la Gaule élevait, obscurs et douteux témoins de la mémoire des héros....2 C'est en comparant la révolution de 1789 a ”sa jeune soeur de 1848” (Histoire de la révolution Francaise, p.9) que Michelet établira des éléments de comparaison entre les deux événements et il laissera aux lecteurs le soin de tirer leurs propres conclusions sur la situation du dix—neuvieme siecle. Le narrateur fait passer son message en mentionnant que ”travaillant seul sur les ruines d’un monde, je pus croire un moment que je restais 1e dernier homme" (Histoire de la révolution Francaise, p.9). La répétition des événements, en ce qui concerne 1e caractere violant de ces revolutions, pose la question de la sfireté des habitants, et de l’instabilité constante. Ce ”vide" laissé par la révolution n’est pas, contrairement a ce que pensait Michelet, un véritable vide, C’est en fait un non-monument mis en place pour indiquer les déVastations des différents gouvernements. Les véritables ViCtimes de ces révolutions sont les monuments historiques ‘ A .u A”- —. - g‘- V"' ~ . I ' - a .A nr’ .: ... .4 v..- “V- . ...-A- . ~ ““‘V"“’ —\ - \I‘v-h-‘v- I A --.- h’ v- . “55“- O ‘ --.... -..- . .— ... ..--at--. .. . ‘ 9 : . 5a I‘, _. ... ‘ ‘~' . ..-... ‘ '1 “V-~-~-..- _ bk...‘.a. -.. -A‘.‘ A“- h "'V.“"'\—-.- . 1‘ ~:"“r .- ‘ “rvu . ;- FAN. -' \ " was- ~. , :: ~-.... __ .u» 'Vl_ :- a fi-’ .‘ I»..‘ A‘”v~.- ‘v...~: . A‘ - '- \uu 5r- A.—“"‘ ‘C‘ u..‘~‘; ‘ .. ‘ F' .. ‘» V... ‘,‘_ - y t Q"~>,‘ s; a - ‘1 5- -“.. fl u a- ‘ .. ‘1 :‘V-. b“-~4 -. A ‘fi‘: A A \'N V- ‘ «t A. ‘ ..- n': \ H... ...fiy.‘- .‘. ~- “: Hg sy‘ 1.: h a P c‘» \: ..‘. My m” s ‘4‘ NV . o . ~4\ 0" ~ a “‘: x x. \ ~1“ h ‘: \‘!~“v VI ..A “'I\'. .— ‘ -\". \n , q . u u .‘ H ‘5‘ ‘A ~ » v... 5 F-. ‘A L... a 'K i ~Q“ \. ‘ Q ~ PM‘L ‘ A ‘- a. ~ ‘ ‘\ ~ \“ 5"" ». N; “we V~. 5‘ A ~‘ 3O qui ont subi les contre-coups des différents regimes, et qui ont été détruits ou amputés. Sa description de l'héritage ou plutot du non-heritage de la révolution révele le probleme ambiant au sortir de la période révolutionnaire; cette destruction des monuments, et l'incapacité des dirigeants de l'époque de trouver un mode de remplacement, a laissé 1e dix— neuvieme face a un manque, un vide architectural. Ces a—coups de l'histoire~ créent. une instabilité, une incertitude fondamentales ex: les auteurs chl dix-neuvieme siecle, emprisonnés dans ce monde a la dérive, se tournent vers le monument médiéval qui représente pour eux la stabilité et l'espoir de soutenir une certaine forme de systeme politique et social a l'aide des arcs-boutants de la littérature; alors que tout s'écroule autour d'eux, l’instabilité politique est donc compensée par le gofit du monument. Ces arcs-boutants se manifestent de deux facons: les monuments en eux-memes et le livre/monument; Chacun des deux ayant comme fonction le soutien d'une structure que ce soit la société ou une cathédrale gothique. Ce retour a l’ere gothique et plus particulierement aux cathédrales est certainement d0 en partie a la representation que se faisait les auteurs du dix—neuvieme des cathédrales, car: ”The scholars of Chartres may have regarded the Creation as Symphony, but they thought of the Creator not as a musicien but as an architect" (The Cathedral’s Crusade, p.6). C’est cette pureté dans les lignes, et cette longévité dans la Construction qui y attira l’attention des auteurs. Le o .- _l- .. .~ A 5A ‘ I _‘ .— v~-..v-- '1 A _ V ...r" .—. v. ... a. s 2. . . ... L. .~_ . . . . ”J .. 2. a- V. .: guv .. g I . < . Y-‘A‘ —- _ .— '~---v%-— ~ 0.;- w.. .T .«a ... Y. ‘nu a. . . ... .1 :v v ... . . ... u. .2 4: .mu ~. 31 style gothique, qui émergea en France au douzieme siecle, en Ile-de-France é: l'abbatiale Saint-Denis, révele Ln1 choix esthétique clairement défini, et le désir de le montrer, de le faire savoir. L’architecte gothique avait dans l'idée de faire l'union des masses qui n'étaient que juxtaposées dans le style roman, et c'est en utilisant l'arc—boutant qu'il liera les masses entre elles de facon a créer une dynamique verticale. C'est cet aspect des cathédrales gothiques, cette unité qui attirera plusieurs auteurs du dix-neuvieme siecle. D'autre part, en ce qui concerne les cathédrales, n’oublions pas la déclaration d’Auguste Rodin, selon qui la cathédrale a une fonction symbolique privilégiée: L’harmonie, dans les corps vivants, résulte du contre— balancement des masses qui se déplacent: la Cathédrale est construite a l’exemple des corps vivants. Ses concordances, ses équilibres sont exactement dans l’ordre de la nature, procedent des lois générales. (...) Comme elle est vraie, juste et féconde, la méthode de nos Vieux maitres du XIe au XIIIe siecle! Cette méthode, c'est, en grand et dans l’union de toutes les forces surhumaines d’une époque, la méthode meme de nos activités individuelles (...) c’est la collaboration perpétuelle de l’homme avec la nature. (...) La cathédrale est la synthese du pays. Je le répete: roches, foréts, jardins, soleil du Nord, (...), toute notre France est dans nos cathédrales3. La cathédrale scelle le pacte de la civilisation, car elle représente la réunion du corps et de l’esprit et c’est en son sein que les étres peuvent enfin se retrouver. Elle représente: ”ordre", ”union”, ”collaboration" et ”synthese” dans un pays en proie a de multiples changements. Il est certain que l'artiste est ici a la recherche d’une harmonie, d’un équilibre que lui fournit la cathédrale. La cathédrale est érigée selon les lois de la nature, elle n’est considérée . . A: ..n h. . ‘ y ‘ P» u.» up. .... L: C C ... ... C .. .... ... u. .» .... ... he. ... . _ . c ... 5: v. , ... ,. . 2. a: . . .3 .. t .3 4. ... ... .5 4n .... .5. at . s 32 que comme une extension de cette meme nature. Ce qui rejoint en fait la pensée de Chateaubriand dont nous reparlerons plus tard. La cohesion, nécessaire a la vie des étres humains, est en quelque sorte retrouvée au sein de la cathédrale, lors des sermons hebdomadaires. De plus, les matériaux meme servant a la construction d’une cathédrale sont empruntés au sol, a la terre, et faconnés par les sculpteurs. N’oublions pas que depuis la légende de Prométhée, procréateur du genre humain (il créa les mortels en les faconnant avec de la terre glaise), les pierres conservent une odeur humaine, elles descendent du ciel pour s’élever de nouveau vers lui. Il en découle que lors des périodes d’instabilité les premiers batiments atteints furent les cathédrales, symboles d’unité et de cohesion, et de la construction d'une cathédrale a la destruction de ce méme édifice le pas fut vite sauté. C’est également le premier monument vers lequel se tourneront les étres humains en cas de doute, et de crise de conscience, car les cathédrales figurent par excellence stabilité et pérennité. Il ne faut pas oublier l’effet culturel de l’abolition des cultes dont la destruction avait comme dessein de ”diviser pour mieux régner", en affaiblissant l’église et les structures qu'elle avait mises en place. Le résultat fut que la population, sans lieux de réunions ni de recueillement, se trouva divisée, éparpillée, en un mot affaiblie vis-a-vis des forces adverses. Les adversaires de la renaissance médiévale . q . . . ‘ . .V ,. v . .. . . ... .. ... .t v. ... ~u ... I u .. .... . . ... .3 4... A . ... u: . . . . . .. . TH .. E ... 2 . . . . .. .3 .. .... u. ... .. ... u. I. .. 2: ...: _ . .. ... . . 2.. ... C ....c .. .~ : a. .2 H.. .v. ... ... ... ... ... .. ... ... v. .. ... ..o s. No. ... :1 . ‘ .. .. .. : ... v. . .. v. .t. . ... .. 2. r .3 .. 2. ... . . _ u . . .: ... . . ... ... ... 6. . ... ., _ 1:. ... E. a. t . .... J . .. . . . . . . .3 .. ... v . . .. ... . . .... ... . . . a», 4... A»... Mi. 33 faisaient leur possible pour éviter toute protection des monuments historiques, (he plus certains edifices furent livrés au vandalisme et au dépouillement de leurs biens immeubles. La politique athée des ultra—révolutionnaires (les Hébertistes), entraina une déchristianisation, ainsi que la perte de toute morale chrétienne. L’esprit de corps qui aurait pu régner parmi les fideles cessa d’exister, car les nouvelles ne passaient plus de la méme facon, et les gens ne se voyaient plus aussi régulierement. La force cum; la religion inspirait aux croyants décrut, le clergé lui-meme perdit de sa Vigueur et son poids diminua face au pouvoir supreme des différents gouvernements: c’est a postériori que la Revolution apparait avant tout comme une entreprise de demolition de de la Vieille France, d’abolition du passé d’une grande nation méthodiquement organisée par des ideologues et des démagogues, assez bornés pour croire que le progres consiste a renier 1e passé pour repartir de zéro sur de nouvelles bases, comme si l'histoire de France commencait le 14 juillet 17894 Cette négation du passé lors de la Révolution résulta en une demolition complete de la France traditionnelle, et du rejet de tout ce qui était ancien. .Les "nouvelles bases" sur lesquelles elle était fondée n'ont été que bien fragiles et ce mouvement révolutionnaire n'a pas duré. La raison pour laquelle nous retrouvons des descriptions de Vieux immeubles impliquant une identification du texte et du batiment selon le topos exegi monumentum au dix—neuvieme siecle est due aux troubles de l'époque. Cette réaction n'est en fait qu’une ‘maniere de compenser l'absence .. aus ;—. in .u. ~. .. .3 .3 y .. n. 2. 4: .5 ~ v-p 8.5—- c. ..-.- - .. :A Q ~: . .: u L» h a 3. E .l v. .. .. 4: A. A» .. nu. .sx ua ‘ 1 x~ .~ ... ‘~‘ 1 : r . E .... C. S 2.» E .\ s e .1 ‘ 34 d'institutions unificatrices, les lieux saints qui autrefois étaient des lieux de réunions, et qui de par leur disparition avaient dfi étre remplacés par d'autres batiments. C’est alors que cette rhétorique de la certitude devient nécessaire pour remplacer l'incertitude, cum. ébranle le monument/cathédrale. En effet, des qu’il s'agit d’ancrer un siecle a la dérive, le retour sur le passé devient une réalité et représente la stabilité perdue que les auteurs essayent de redécouvrir. Evidemment, chacun des auteurs utilisera la representation de cet objet a des fins personnelles selon ses propres croyances. Des textes tels que les descriptions pittoresques, la défense de la Vieille architecture par Taylor, Cailleux et Nodier dans Les voyages pittoresques et romantiques dans l'ancienne France; par Hugo avec son celebre poeme "La bande noire”; par Alyosius Bertrand dans Gaspard de la nuit; 1e roman historique; et par Théophile Gautier dans "L'art poétique", sont quelques-unes des tentatives pour remettre en valeur le passé d'avant la revolution. Dans Gaspard de la nuit, le scripteur reconstitue la ville de Dijon et atteste d’un Dijon d’aujourd’hui, un Dijon d’autrefois. (dans lequel) [1e narrateur efit] bientot déblayé le Dijon des 14e et lSe siecles, autour duquel courait un branle de dix- huit tours, de huit portes et de quatre poternes ou portelles, - - 1e Dijon de Philippe-le-Hardi, de Jean- sans—Peur, de Philippe-le-Bon, de Charles-le-Téméraire, - - avec ses maisons de torchis, a pignons pointus comme 1e bonnet d'un fou (...) - - avec ses églises, sa sainte chapelle, ses abbayes, ses monasteres (...) J’avais galvanisé un cadavre et ce cadavre s’était levéS I a .- ~ ‘ i W“ ... x. . . ~. .2 4‘ ‘ ‘ «x» Vs «C . .. ._ .. L? ... a. Z Z 4‘ ._ u. v. ... .q. u. ;— Ax. ... r” u. v“ ‘N‘ .5 '..~& \L ... .n.. \\w ~\~ ... ... A. v. ;_ .: .T . . .. ... C ... .. .2 :t L: - at Q. v. u... .. v. ... .. 4. .. .... a. s... ..a \u I .. y. .L .«u Au .2 35 Le scripteur devient architecte et une ville entiere s'anime sous la plume de ce créateur qui a le pouvoir de faire renaitre tout ce qui a pu étre détruit sous la revolution. Non seulement le scripteur devient architecte, mais il se transforme en archéologue et "déblaie" la ville pour la redécouvrir dans un contexte médiéval. Cette reconstitution est une des seules possibilité de faire revivre le passé et l'écriture est le moyen dont dispose les auteurs pour revivre des événements d'une période engloutie. Cette reconstitution livresque est une facon de prévenir les gens et de leur montrer les dégats survenus, car selon le narrateur Dijon n’est plus que l'ombre d’elle-méme. Louis XI l’avait découronné de sa puissance, la Revolution l'a décapitée de ses clochers. Il ne lui reste plus que trois églises, d’une sainte-chapelle, de deux abbayes et d’une douzaine de monasteres. (...) Et moi, j’errai parmi ces ruines comme l'antiquaire qui cherche des médailles romaines dans les sillons d’un castrum, apres une grosse pluie d’orage (Gaspard de la nuit, p.16) Cette errance du narrateur a travers les vestiges de la ville montre a quel point la revolution avait laissé des traces indélébiles sur les étres humains, mais aussi sur les monuments indicateurs de civilisations. L'image du clocher "décapité" est choquante dans sa cruauté et sa véracité, et témoigne une fois de plus de la violence perpétrée par les révolutionnaires. L'architecture, étant .l'écrivain :de l'histoire, il est donc évident que les secousses et les destructions de la période révolutionnaire allaient laisser des séquelles importantes snub ces ouvrages diart. Les "vestiges" qui ont survécu a ce désastre sont en fait encore fir-‘ - V‘s." — *‘<-u9’-‘- -v y ..u v“ ... .3 L | ~_,-‘ A L: L. a. .3 .o . - :x \-V \ ~ IK- 36 plus parlant que si rien n'avait été intenté contre les batiments, ils signalent donc l'effet destructeur qu'a eu la révolution en voulant se débarrasser des symboles d'un pouvoir trop fort, fonctionnant en parallele avec la royauté absolue. Chaque auteur aura sa propre vision, et interpretation du role du monument, et pour Hugo, il s’agit de sauver ce qui doit étre sauvé en reflétant tel quel l'Ancien Régime, c’est une prise de conscience d’un passé en train de disparaitre et une tentative de la part du scripteur de faire face a la réalité. En ce qui concerne les monuments, il semble nécessaire d'établir leur statut historique avant d'étudier leur statut littéraire, c'est pour cette raison que nous allons établir une liste des différents monuments et de leur statut architectural. Des le dix-huitieme siecle, alors que les différents gouvernements tenterent de pméserver certains monuments, beaucoup de ces édifices furent détruits. Le vieil adage latin "tempus edax, homo edaciorf sembla se vérifier a cette époque, car les Jacobins se livrerent a un vandalisme anti- Chrétien, et tenterent d’instituer le culte de l’Etre Supreme. Rappelons-nous que le terme "profanation" signifie: aVilissement, degradation, violation et ce qui arriva aux personnes physiques pendant la révolution eut les memes réSultats sur les batiments, le degré de profanation atteint alorws toutes les couches de la société. Selon Wilhelm Treue o . «c \e ._» . v . .2 .. .. Z. ..i ..‘ . . . 3 ... 4‘ Z» a; A V v. .2 FL. ‘ S L .~. _ u ..a C r . T. 2 ~. ~\~ ,3. .: yam -m ... .‘at ... “ $323.71.; C .c E E 4.: a. C .21 v. .2 v‘... o ' s h . ‘1 i. p ..s‘ a» k .. a . h v \ s \~¢ A~\ \. ‘ \M‘ “ks F \ E - 4 E .: E ... o .3 T. r S r ‘2 37 With the outbreak of the French Revolution (...), the domain of art shared in the general upheaval (...) When in 1789 the French people created its new state on new principles, these principles found wide application in a new attitude to art. As all power proceeded from the people and had to serve it, works of art also belonged to the people and had to be at its service (...) [therefore] without the slightest concern for historical associations or respect for the rights of ownership, castles, churches and monasteries were stripped of their treasures6 La liste que nous allons dresser n'est certes pas exhaustive, mais elle nous donnera un apercu de l'état des lieux. Des 1791, la cathédrale de Chartres est livrée au pillage, alors qu'en 1794 Notre-Dame devient un magasin de vivres et révele \ des portails vidés de statues, des vitraux défoncés, et a l'intérieur autels et tombeaux ont disparu. Les églises paroissiales du moyen—age telles que Saint-André-des-Arts, Saint-Hippolyte pour n'en citer que quelques—unes sont démolies. C'est Montalembert qui souligne que la preservation des monuments paiens domina celle des monuments religieux, et il en fit la constatation suivante dans La Revue des Deux MOndes: On ne parvient pas a fléchir les divans provinciaux, les savants de l'Empire, qu'en invoquant le respect dfi au paganisme. Si vous pouvez leur faire croire qu'une église du genre antégothique a été consacrée a quelque dieu romain, ils vous promettront leur protection, ouvriront leurs bourses, tailleront meme leur plume pour honorer votre découverte d'une dissertation (...) Je [le narrateur] ne veux citer que la cathédrale d'Angouléme dont la curieuse facade n'a été conservée que parce qu'il a été gravement établi que le bas- relief du Pere éternel, qui y figure entre les symboles consacrés aux quatre évangélistes, était une representation de Jupiter. On lit encore sur la frise du portail de cette cathédrale: TEmple de la Raison7 En eeffet, la religion ayant été mise a l'écart tout d'abord, au Ilrofit de l'athéisme et quelques temps plus tard a celui . 4-\.‘ ~\ - a . . ..\ . 1 ~ 4 o . . ~ . - .~ A‘ a y — .—~ . . . ~ — . -—u r g as! .~ \ . q S h 5: K. .H L. ... a. l: L: x.“ ~. an. 2. l: 2» h. H, : _~. ... a. to _. L. T . . a: r. A: . o t. 3 u ... . . ... _ .. .2 . c \ . x c a .t A.» t ”a .. .2 ... .. r .1. . c r :1 .2 L; .11 i . .3 ... .: A. : .3 T. : ~: .: . ~ ... .m‘ Ad ‘ ‘ 5. ‘ a 38 du culte de l'Etre supreme (institué par le décret du 18 floréal an II), les différents gouvernements ne voulaient en aucun cas participer a la restauration d'oeuvres chrétiennes et ce fut le début de la destruction des monuments religieux: L’expropriation de l’Eglise n’est que le premier acte de la politique anti-religieuse de la Revolution. Le second fut la Constitution Civile du clergé qui fut votée le 12 juillet 1790 (...) [et] le 17 aofit, l’Assemblée ”considérant que les batiments et les terrains occupés par les religieux et les religieuses offrent de grandes ressources a la nation, qu’il importe de les libérer, qu’il n’importe pas moins de dissiper le reste de fanatisme, auxquels les ci— devant monasteres présentent une trop facile retraite, décrete: a partir du ler octobre 1792, toutes les maisons actuellement occupées par des religieux seront évacuées et mises en vente8 Il apparait que si pour certains monuments historiques des fonds de conservation furent établis9, ce fut au dépens des monuments religieux que les révolutionnaires ne comptaient pas défendre. Certains monuments religieux furent profanés et utilisés a des fins séculaires, d'autres furent tout simplement mutilés, ou détruits, en un mot rasés. Par consequent, la religion fut mise a l'écart a cause du pouvoir grandissant des membres du clergé; il en résulta que les batiments représentant le pouvoir de l'église furent altérés. Le monument en tant que symbole d’une institution devient un objet de rejet, a cause de la menace éventuelle qu'il dégageait, et il devint alors nécessaire de le détruire. Une des manifestations representative de la peur qu'inspiraient les monuments religieux aux révolutionnaires eut pour Consequence que l'un des ordres donné par les Jacobins a l'encontre des monuments ecclésiastiques fut d'interdire les d‘y-'0‘ .. 1.. .. .. ~.. ~. 1: v. 1 .. E ... I E :. ..1 ~ ., .. .. ... .1 v. .. .. ... .. a. .‘ 4‘ L: 2. .. A. ... ... .3 ~: ~: to r.. ... ... _. .. . . . Q ...a. L. .... ...H. .. ... z: ;. .... C . E Z 1. 4.1 ..t 41:. Q.» 2. . ... 4. 2. 2 . . c a. 4. we. a. 4‘ ya ~: 4... 39 clochers, car leur position dominante sur les autres edifices était contraire aux puincipes révolutionnaires d'égalité (cette consideration reprend en quelque sorte, bien que pour des motifs différents, celle de Saint Bernard de Clairvaux qui, au douzieme siecle, s'opposa a la construction des clochers cisterciens contraires a la modestie de l'ordre). Quelles qu’en soient les raisons, le résultat est criant de similitude; les monuments apparaissent comme des objets entre les mains d'individus qui les modelent a leur aise. Chaque régime, ordre, ou personne se croit capable de modifier, de dégrader, ou d'altérer un édifice selon ses croyances et ses désirs. Cet édifice est alors, tel une personne, privé de son intégrité physique, mutilé, réduit a n’étre qu’une partie du tout. Au lieu d'étre un édifice a part entiere, il ne devient qu'un des éléments composant 1e tout, sa force et son pouvoir vont s'ameunuisant et il perd tout pouvoir de controle, vérifiant ainsi la théorie selon laquelle i1 faut diviser pour mieux régner. Un autre témoignage de l'état des monuments francais revient a Pierre Léon, membre de l'Institut et directeur général honoraire des Beaux-Arts, dans son oeuvre sur La vie des monuments francais: destruction, restauration; qui dressa 1111 inventaire de l'état des lieux de la période pré— révolutionnaire jusqu'au vingtieme siecle. Il tenait a Signaler que malgré les tentatives de restauration et de preservation, les monuments ne purent tous étre conservés en fonction de la période troublée que le pays traversait. Meme ... .\v .3 ...w 4—. .x. .‘~ .3 r». NC 3 S .: ... ‘ v s . . 40 Si ”une des taches essentielles qui s’imposa a la Commission des Monuments historiques, des 1e debut de ses travaux, fut d’effacer les traces laissées dans les edifices par le vandalisme révolutionnaire"m, le vandalisme ayant déja eu lieu, il était tres difficile de réparer les erreurs du passé. Selon lui: l'institution du culte décadaire devait continuer a l'intérieur des églises l'oeuvre de devastation. Le déploiement des importants corteges qui prennent part aux fétes de la Raison oblige a débarasser les nefs de tout ce qui peut géner la circulation: jubés, clotures, tombeaux. (...) Les églises ainsi dévastées, au nom de la Liberté et de la Raison, devaient étre atteintes dans leur existence meme par le vandalisme d’utilisation. Tous les matériaux de nature a servir a la défense nationale, tous les objets dont la vente pouvait procurer des ressources au Trésor furent inventories et enlevés11 En fait, cette destruction n'est pas totale puisque la réutilisation des matériaux dans d'autres constructions presuppose un semblant de permanence, de vie sous une autre forme. Cependant, tout ne fut pas détruit, et les monuments ayant survécus a la folie dévastatrice révolutionnaire durent étre restaurés, c’est alors que la controverse sur les restaurations fit EMNI apparition, ck; plus ”l’ignorance archéologique qui régnait sur les systemes de construction EEmployés au Moyen-Age ne laissaient souvent d'autres ressources que de démolir les parties les plus menacées" (La Vie? des monuments francais: destruction, restauration, p. 352). Les destructions de la revolution laisserent de grands Vides dans le patrimoine historique du pays et c’est pour cela que des le début des grandes restaurations Anatole L‘EEI‘Qy-Beaulieu précise que: . _~\ 2.. r a. ... .~» .~. ~: .~\ .~‘ V‘ E _.. A: ... 3. a. 2‘ .~‘ ha. : s a: .. s .y» ‘5‘ 41 i1 nous est arrivé en architecture, écrit—il, ce qui arrive en histoire naturelle. Nos divisions et nos classifications, nos definitions et nos formules ont été plus marquees, plus exclusives que ne le comportaient les choses elles—memes. (...) Or un monument n’est pas seulement une oeuvre d’art, c'est un document. Excuse-t-on la falsification des monuments écrits? Ira—t-on, en réimprimant Joinville et Charles d’Orléans, redresser leurs fautes ou leurs incorrections en profitant des progres de la philologie? La question n’est pas de faire mieux, mais de respecter ce qui existe12 Qu'en est—i1 alors du statut du monument? I1 s'agit d'en donner une definition de maniere a observer l'utilisation qui en est faite par les précurseurs: Volney et Chateaubriand. D'apres lfia.Dictionnaire chz dix—neuviéme siécle, l'étymologie du terme "monument" proviendrait de monere, avertir. "[c'est un] ouvrage considerable d'architecture ou de sculpture, destiné a perpétue; le souvenir de quelque fait important on de quelque homme remarquable. (...) Par analogie: eeuvre durable, dans un genre quelconque” (p.531). 11 est certain qu'il s’agit d'une fausse étymologie qui est issue non pas de ”monumentum" signifiant rappel, mais de ”monere”, avertir, qui est une des interprétation de l'étymologie. La destruction des monuments est ironique car elle prévient du coté périssable d’un monument qui est un signal en soi, auquel les étres humains du dix-neuviéme auraient dfi préter atttention. Cette définition presuppose l'idée de permanence, qui semble tout a fait contradictoire et paradoxale a la lumiere de l'argument de Volney et de Chateaubriand, pour qui le monument est une u . .2"— .-.. :- ..4 “....0V V" .. . . . .. I ... .. ... ... , ... ... ... .. . C v. . . I . . a. E ..u ... . . .. v. ... .. v. .C .. h.“ ..t .. .. .... .2 «a S S .r v. . c : .. 3. .3 T. .. .: ... v. .: .. ... .... v. .... ... S C. .. w ._ v. ... .. *u .3 2. . y .3 v. ... ~o... . s 4. Fr. 1: —. ... 2. .. .. .. .t . . . v. a. . .. ... v. - ... .. ~. . 3. 1: .. .3 so. y. 3 . . ... .o . . . . . ... C. . . at r y. 4.: ... . . - . . ..u ... u... 2. ~ : . . .. .. 2. S .3 2. S ... .... C. .. .. M... ...“ ......c .._.. -.. .... ......c ...... a...» ...... ... Q Q Q ‘. h i.‘ 42 oeuvre périssable dont la survie dépend des efforts vigilants des étres humains. Chez les deux auteurs du tournant du siecle que nous allons étudier tout d'abond, le gout du Hmmument semble s'associer pour l'un a un certain conservatisme politique, alors que pour le second il semble s'associer a la soumission a l'ordre providentiel. En effet, Volney traite de l'avenir politique de l'étre humain, alors que Chateaubriand évoque le Dieu tout-puissant dirigeant la destinée de ce dernier. Nous examinerons donc la perspective de volney, puis celle de Chateaubriand sur les monuments, et nous essayerons d'en dégager une philosophie. Vers la fin du dix-huitieme siecle, les monuments cedent la place aux ruines qui deviennent prépondérantes dans la littérature. D'apres 1e Dictionnaire du dix-neuviéme siecle, le terme de ruine viendrait du latin "ruina" de "ruere", détruire, représentant la demolition d'un batimen't, d'un ouvrage de maconnerie; les décombres, restes, débris d'un ou de plusieurs édifices. Cette étymologie reflete le dépérissement du monde connu et révele un nécessaire retour aux sources, de maniere a faire examiner les causes du mal et a résoudre les maux de la société. Apres avoir formulé cette definition, nous comparerons les travaux de Volney a ceux de Chateaubriand, car les deux auteurs, a quelques décennies d'écart, traitent le sujet des ruines, qui devient recurrent dans la littérature de la fin du dix-huitieme, et du début du dix-neuvieme siecle. Volney r. ... .p.. .3 .: A‘- . .. .2 L9 Q» a.» .2 5». ‘NH 43 développe une vision volontariste et progressiste avec son "Génie des tombeaux et des ruines" et présente une étude retrospective de la situation dans Les ruines ou meditation sur les revolutions des empires, ouvrage ou il essaie de stabiliser la société francaise a l’aide de ses écrits en lancant a la population un cri d'alarme dans cette fin de siecle bouleversée. S’étant installé sur les rives de l'Euphrate pour contempler le paysage, il se trouve submerge d'une multitude d'émotions, de réflexions qui lui permettent de deviner l'attitude de la race humaine: dans la plaine, la scene de ruines la plus étonnante: c'était une multitude innombrable de superbes colonnes debout, qui telles que les avenues de nos parcs, s'étendaient a perte de vue en files symétriques (...) Ces lieux solitaires, cette soirée paisible, cette scene majestueuse, imprimerent a mon esprit un recueillement religieux (...) tout éleva mon coeur a de hautes pensées (...) je m'abandonnai a une reverie profonde13 Face aux mutilations encourues par les différentes civilisations, le narrateur se sent parcouru d'une rage intérieure et "[s]es yeux se remplirent de larmes" (Ruines, p.15). 11 s'inspire donc des monuments "paiens" qui résument bien cette fin de siecle ou la foi avait été remplacée par un esprit rationaliste. Le narrateur opere une réflexion sur le passé, et contemplant la gloire passée de ces cités, il pose des questions de rhétorique, telles que: "Ah! comment s'est éclipsée tant de gloire!...Comment se sont anéantis tant de travaux! Ainsi donc périssent les ouvrages des hommes! ainsi s'évanouissent les empires et les nations" (Ruines, p.10)- .t r- ...y... ...-w. .2 v” S. S. ... .. v. ... .: ... a . . .. L. a: ... _: ... . ;_ ... ... ...... g ._ .1: ...: .... w” ...... . .1 v. ... .: ... . C ...civ.:....v.c. : a: ... .~‘ ... t. . m a Q. . . t. x... z . C ... C. C s 1:. 44 Tel Chateaubriand, Volney essaie d'invoquer l’intervention divine car peut-étre qu'"un Dieu mystérieux exerce ses jugements incompréhensibles" (Ruines, p.15). C'est en fait a cet endroit que les deux auteurs divergent, car s'ils semblent tout d'abord se faire écho, le résultat est en fait tout a fait different. Volney remet en question "Cette malédiction divine qui perpétue l'abandon de ces campagnes" (Ruines, p.18) et le "fantdme" harangue la foule des monuments témoins de ce chaos: Dites monuments des temps passes! Les cieux ont—ils changé leurs lois, et la terre sa marche? Le soleil a-t-il éteint ses feux dans l'espace? (...) Répondez, race de mensonge et d'iniquité, Dieu a—t-il troublé cet ordre primitif et constant qu'il assigna lui—meme a la nature? (...) Ah! c'es fa s emen v s a c z 1 le sort et la Divinité? Est-ce Dieu qui en a causé la ruine? (...) ou est-ce le bras de l'homme? (Ruines, p.18-l9) Le Génie, qui sert de médiateur, sait que la fatalité n'y est pour rien dans la chute de l'étre humain, qui doit étre responsable de ses propres actions. C'est a ce moment que Volney introduit la notion de destruction par ce dernier: "la source de ses [de l'étre humain] calamités n'est point reculée devant les cieux (...) elle réside dans l'homme meme; il la porte dans son coeur" (Ruines, p.20)° Il dénonce a travers l'écriture, la destruction par l'étre humain et en cela tente une restauration verbale, il donne un coup de semonce aux lecteurs/lectrices de son époque en les avertissant du caractere éphémere du monument. Il opere en fait une réflexion sur la fragilité, l'instabilité de son époque. Volney traite de la désintégration des empires et des ‘ ’Av‘. -AV“ .- ..._.~“'" .. ;. .. ... 2. .2 .C s . .~. 5 . .... .7. . ... I.” A “..‘K— \— «r 2. ~ . .2 .... .2 45 monuments qui en sont les témoins, car ils portent les marques de ces changements. Ces traces sont des cicatrices qui préservent ou effacent le souvenir d'un regime évanoui, car chaque siecle voit non seulement des additions apportées aux monuments par les différents architectes, mais aussi des restaurations qui font disparaitre les styles préexistants (cf. Viollet-le-Duc et ses travaux, violemment critiques par la suite); n'oublions pas que "restaurare", "renovare" ou "reficere" signifient a l'origine refaire, renouveler et non 'Ioas recréer l'état d'origine. Cette dialectique de reconstruction par la méditation, Engis par le dialogue avec l'apparition du Génie des tombeaux eat des ruines crée un effet de surprise et reflete le malaise c1u.temps. Le Génie est généralement considéré comme un étre snarnaturel d’un esprit supérieur, qui possede une science iJnconnue des simples mortels. Dans la tradition du dix- rnauvieme siecle, le Génie possede la connaissance et il peut aiJnsi dialoguer avec les humains: le choix du Génie se porte SLur volney (c’est en tout cas le choix de l’auteur historique numents, l’age de leur beauté” (Notre-Dame de Paris, p.135) Lea scripteur ne parle donc pas de restaurer la cathédrale en scan état initial, mais de la ”réparer” car meme si c'est encore aujourd’hui un majestueux et sublime édifice (...) Mais si belle qu’elle se soit conservée en vieillissant, il est difficile de ne pas soupirer, de ne pas s’indigner devant les degradations, les mutilations sans nombre que simultanément 1e temps et les hommes ont fait subir au vénérable monument, sans respect pour Charlemagne qui en avait posé 1a premiere pierre, pour Philippe-Auguste qui en avait posé la derniere (thre- Dame de Paris, p.133) 1&3 scripteur se pose en défenseur des monuments et prepare 'une restauration littéraire, un retour aux sources vers une iniité et une pureté perdues au fil des siecles car ce que nous disons ici de la facade, il faut 1e dire de l’église entiere; et ce que nous disons de la cathédrale 97 de Paris, il faut 1e dire de toutes les églises de la chrétienté au moyen—age. Tout se tient dans cet art venu de lui—meme, logique et bien proportionné (thre— Dame de Paris, p. 134) Le: cathédrale a eu plusieurs fonctions au cours des siecles cet; l’une d’entre elle se trouve etre d’enregistrer l’histoire (is: notre civilisation, c’est alors que le scripteur fait Huerition de la cathédrale en tant que livre de l’humanité, car lxozrsque ”l'imprimerie tuera l’architecture” (NOtre-Dame de .PELris, p.225) i1 y aura tout de meme quelques traces de ce cries représentaient les monuments. Le développement de la <2a12hedrale fut parallele a celui de l'évolution de l’humanité et, il est important de souligner que les cathédrales furent les; premiers livres de l’humanité, c’est sur et avec elles quea furent rédigées les toutes premieres regles on scella chaque tradition sous un monument (...) l’architecture commenca comme toute écriture. Elle fut d'abord alphabet. On plantait une pierre debout, et C’était une lettre, et chaque lettre était un hiéroglyphe, et sur chaque hiéroglyphe reposait un groupe d’idées comme le chapiteau de la colonne (thre- Dame de Paris, p.225). Lei cathédrale ne s’arréta pas en si bon chemin et elle commenca a se développer, a se raffiner sous le coup de Crayon de l’architecte. Elle devint alors un veritable dic t ionnaire , car plus tard on fit des mots. On superposa la pierre a la pierre, on accoupla ces syllabes de granit, 1e verbe essaya quelques combinaisons (...) Enfin on fit des livres. (...) L’architecture alors se développa avec la pensée humaine (...) 1e pilier qui est une lettre, l’arcade qui est une syllabe, la pyramide qui est un mot (...) se groupaient se combinaient, s’amalgamaient, descendaient, montaient, se juxtaposaient sur le sol, s'étageaient dans le ciel, jusqu’a ce qu’ils eussent écrit, sous la dictée de l’idée générale d’une époque, 98 ces livres merveilleux qui étaient aussi de merveilleux édifices (thre—Dame de Paris, p. 227—8). (Shacune des parties de la cathédrale représentait un ajout au ciictionnnaire de l'humanité, ne cessait de se développer car ”1e symbole avait besoin de s’épanouir dans l’édifice" (.thre—Dame de Paris, p.226). Cette "pyramide” ccnnsciencieusement échaffaudée enl fil des siecles est LHI mszrocosme du roman lui—meme, car cette oeuvre se développa axnec la pensée humaine de l'époque parallelement au développement de la cathédrale. Les mots commencerent a joncher les feuilles de papier, a s'assembler au fil des jcn1rs de facon a former un message, un livre et a prendre la plaice du monument. C’est ainsi que lors d’une discussion en1:re Jacques Coictier et l’archidiacre, ce dernier informe sor1 interlocuteur qu’il lui: fer[a] lire l’une apres l’autre les lettres de marbre de l'alphabet, les pages de granit du livre (...) [ils épelleront] encore ensemble les facades de Saint—Come, de Sainte—Genevieve-des—Ardents, de Saint-Martin, de Saint-Jacques-de—la—Boucherie (thre—Dame de Paris, p.22l-2). CGttxe amertume sortant de la hmuche de Frollo montre le Clésarroi de certains face au changement, et la peur de l'irnsonnu, notamment de l’arrivée de l'imprimerie et lorsque CCJiCZtier lui demande: ”qu’est-ce que c’est donc que vos livrwes?" ce dernier n’a qu'une seule réponse: ”il désigna du doigt: l’immense église de Notre—Dame [et ajouta] promenant un tristma regard du livre a l'église: Hélas, ceci (...) tuera celafl’ LNOtre—Dame de Paris, p.222). 99 3 . Le livre C'est une acceptation manuscrite, et imprimée des changements survenus au dix—neuvieme siecle, une recreation littéraire de la cathédrale de pierre, il remplace alors le monument, et devient un symbole de l'histoire de l'humanité. a. La victoire de l'écrit sur la pierre Des l'invention de l'imprimerie, des milliers de copies commencerent a étre vendues, alors que la cathédrale, comme les parchemins, sont des objets uniques, soumis de par la aux intempéries du temps et aux destructions et altérations des étres humains des diverses époques. Les manuscrits ont longtemps été fragiles face aux éléments et aux étres humains, et leur rareté les amenaient a étre encore plus susceptibles a la destruction que d’autres. Nul n'est a l'abri des ravages du temps, cependant, les livres n’étant Plus de rares éditions peuvent étre réimprimés, alors que les manuscrits et cathédrales sont des oeuvres exclusives issues de l'esprit créateur de l’architecte ou du scripteur/ enlumineur. Le bloc monolithique représente par la Cathédrale remplace un autre bloc, celui du livre imprimé, S'YmbOlisé par la pluralité, par son coté malleable, pouvant étre réimprimé et diffusé plus facilement. Le discours écrit prend la place du discours visuel, évolue avec le temps et peu é. peu atteindra un plus grand public: l’unité de la pierre s’oppose a la pluralité des livres et a leur Prolifération générée par l’imprimerie. Cette pluralité lOO révele l’aspect changeant de la société du dix-neuvieme siecle, c’est un aveu de l'auteur historique de son impuissance a empécher/ retarder l’évolution du monde et donc i1 reconnait la nécessité de coopérer avec les forces responsables de ce changement. Le livre de meme que la cathédrale est le véhicule de la pensée humaine et dans ce cas il permet au scripteur d’exorciser ses angoisses en les mettant par écrit. b. Le passage de l'oral et du visuel a l'écrit: Au dix—neuvieme siecle, il semblerait au premier abord qu ’un changement soit intervenu dans la nature de l'écriture et, alors que par le passé l'écriture était tirée de la tradition orale, les périodes postérieures au moyen—age se Concentrent plutot sur l’aspect textuel. En fait, la transition de la littérature orale a la littérature écrite a été progressive depuis le moyen-age, contrairement a Certaines croyances annoncant une brutale transformation, et au fil des siecles l’oralité a peu a peu été remplacée par la textualité, sans pour autant completement disparaitre. Selon M- Riffaterre: written texts resemble oral stereotypes and in general, formulaic style, which used to be the mnemotechnic grid that kept together long stretches of spoken narrative and protected the tradition (more specifically, the traditio) from a proliferation of Inouvance (...) the principal mechanism of a written text [being] memory8 cependant, meme si textualité et oralité ne sont pas si éloignés l’un de l’autre, en tant que technique de diffusion lOl d'un message donné, il semble difficile de recapturer l'atmosphere du moment passé. Au dix-neuvieme siecle, bien que chez Hugo les personnages, l'histoire, et le lieu soient médiévaux, il s’agit en fait d'un faux retour vers le moyen- age, d’un impossible réve qui ne parvient pas a passer outre l’évolution des siecles. L’oralité médiévale fait place a la textualité dix-neuviémiste avec V. Hugo et alors que la page blanche devient l’instrument de recréatbmn de la société d’antan, 1e scripteur se trouve incapable de recapturer totalement l’ idéal moyenageux espéré. Ce retour au quinzieme siecle, vers Paris ”ou tout ce qui est seve, tout ce qui est vie, tout ce qui est ame dans une nation, filtre et s’amasse sans cesse goutte a goutte, siecle a siecle” (NOtre-Dame de Paris, p.146), et c’est ce texte, resitué au quinzieme qui reflete le besoin de structure éprouvé par le narrateur, c’est la raison pour laquelle il établit des bornes historiques qui marqueront le début d’une ere, d’un livre. Tbut est organise dans le roman, le scripteur recrée des mondes coexistant en parallele, Paris la cathédrale et le livre, et c’est a travers ces entités que les personnages évolueront. Ce désir de structure, d'organisation, de reconstruction et de restauration livresque des monuments ayant existé, met en exergue le désordre régnant au dix—neuvieme siecle au niveau pOlitique, social et économique. Il semble que pour éviter le renversement de l'ordre, chaque personnage se trouve ClOisonné dans une fonction unique et dans un lieu. Chacun l02 vit dans son monde sans pouvoir franchir les barrieres eétablies par la société, et les moeurs: La Sachette vit dans son ”trou aux rats” sans pouvoir en sortir (claustration ‘volontaire qui perdra sa fille); Quasimodo partie intégrante